ARCHIVÉE - Remédier aux problèmes de santé de la population autochtone

Santé Canada
2003
ISSN 1496-466 X
ISSN 1499-3503 (en ligne)

Table des matières

Depuis la fin du XIXe siècle, le gouvernement fédéral a mis en oeuvre des mesures pour répondre aux besoins de la population autochtone en matière de santé. Malgré des avancées notoires, la population autochtone n'a pas atteint le même niveau de santé que les autres Canadiens. Plusieurs disparités persistent. Ainsi, chez les peuples autochtones, on note des taux très élevés de blessures, de suicides et de diabète.

Aujourd'hui, par l'entremise de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (DGSPNI), Santé Canada travaille de concert avec ses partenaires des Premières Nations et des Inuits, pour offrir un large éventail d'activités de prévention et de promotion de la santé et de services de santé publique dans les réserves autochtones et les collectivités inuites répertoriées. Dans les régions éloignées et isolées, où peu de services sont assurés par la province ou le territoire, la Direction générale prodigue des soins d'urgence et des soins primaires dans les réserves. On offre également des services de santé non assurés, comme l'assurance-médicaments et l'assurance des soins dentaires aux Premières Nations et aux Inuits admissibles sans égard au lieu de résidence des bénéficiaires.

La DGSPNI travaille depuis 20 ans avec les collectivités des Premières Nations et des Inuits pour qu'elles assument la pleine responsabilité des programmes de santé communautaire. Cette passation de pouvoir s'opère au rythme propre de la collectivité. De la sorte, les collectivités sont à même de prendre part à la conception et à la mise en oeuvre des programmes et des activités opérationnelles adaptés à leurs besoins particuliers.

En plus de l'engagement de la DGSPSI, la Direction générale de la santé de la population et de la santé publique (DGSPSP) du Ministère offre des programmes qui visent certaines populations précises comme les Premières Nations vivant hors des réserves, les Métis et les Inuits. Le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones dans les collectivités urbaines et nordiques est spécialement conçu pour les populations autochtones, tandis que d'autres programmes, comme le Programme d'action communautaire pour les enfants et le Programme canadien de nutrition prénatale, comptent beaucoup de participants autochtones.

En dehors des programmes et services offerts par Santé Canada, les provinces et les territoires dispensent des soins médicaux et hospitaliers aux Autochtones.

Le présent numéro du Bulletin de recherche sur les politiques de santé porte essentiellement sur les gestes concertés visant à remédier aux écarts entre l'état de santé des Autochtones et celui de l'ensemble de la population canadienne. On y analyse notamment l'importance des programmes et services de santé adaptés à la culture autochtone ainsi que le rôle joué, sur le plan de la santé, par les femmes autochtones au sein de leur collectivité. En outre, deux études de cas illustrent certains des moyens employés par Santé Canada pour travailler en partenariat avec les Autochtones afin d'améliorer leur état général de santé.

Notre mission est d'aider les Canadiens et les Canadiennes à maintenir et à améliorer leur état de santé.

Santé Canada

Profil du Bulletin de recherche sur les politiques de santé

Le Bulletin de recherche sur les politiques de santé de Santé Canada est publié trois fois l'an. Le bulletin s'inscrit dans un programme général de communication axé sur la recherche en politique ayant pour but d'enrichir la base de données probantes pertinente aux politiquex de Santé Canada. Un comité directeur ministériel présidé par Cliff Halliwell, directeur général de la Direction de la recherche appliquée et de l'analyse (DRAA), Direction générale de l'information, de l'analyse et de la connectivité, oriente le tracé du bulletin. La Division de la gestion et de la diffusion de la recherche (DGDR), qui fait partie de la DRAA, coordonne la préparation et la production du bulletin. La DGDR tient à remercier les membres du comité directeur, ainsi que les membres de son personnel, en particulier Nancy Hamilton et Linda Senzilet, directrices-rédactrices en chef, Jaylyn Wong, rédactrice adjointe, et Raymonde Sharpe, distribution. Un merci particulier à la direction responsable de ce numéro, soit la Direction des politiques, de la planification et de l'analyse stratégique de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits.

Nous vous invitons à faire part de vos observations, de vos suggestions ou de tout changement d'adresse à : bulletininfo@hc-sc.gc.ca ou par téléphone à
(613) 954-8549 ou télécopieur à (613) 954-0813.

Vous pouvez accéder à la version électronique du bulletin.

Termes utilisés fréquemment

Peuple autochtone
Désigne les premiers peuples d'Amérique du Nord ainsi que leurs descendants. La Constitution canadienne stipule que les peuples autochtones du Canada sont répartis en trois groupes : les Indiens (Premières Nations), les Métis et les Inuits.
Indiens
Le terme désigne les personnes indigènes du Canada qui ne sont ni inuites ni métisses. Au Canada, on parle généralement des membres des Premières Nations plutôt que des Indiens.
Première Nation
Terme dont l'usage s'est répandu dans les années 1970 afin de remplacer le mot Indien, que certains trouvaient offensant. Bien que l'expression « Première Nation » soit largement utilisée, il n'en existe aucune définition officielle.
Inuits
Autochtones de l'Arctique canadien qui vivent essentiellement au Nunavut, dans les Territoires du Nord-Ouest ainsi que dans le Nord du Québec et du Labrador.
Métis
Désigne les personnes de descendance à la fois autochtone et européenne - elles se distinguent des membres des Premières Nations, des Inuits et des non-Autochtones.
Indiens inscrits
Autochtones inscrits ou habilités à s'inscrire comme « Indiens » auprès du gouvernement fédéral en vertu de certains critères de la Loi sur les Indiens. Les Indiens non inscrits sont ceux qui se considèrent comme Indiens ou comme membres d'une Première Nation, mais qui ne sont pas reconnus par le gouvernement du Canada à ce titre. En 1985, le gouvernement fédéral a modifié la Loi sur les Indiens, ce qui a permis à des milliers de personnes qui avaient perdu leur statut de s'inscrire au Registre des Indiens.

Références

Le Registre des Indiens, Affaires indiennes et du Nord Canada, novembre 1997 (accessible à l'adresse suivante : http://www.ainc-inac.gc.ca/pr/info/info111-fra.php).

Terminologie autochtone, Direction générale des communications, Affaires indiennes et du Nord Canada, octobre 2002 (accessible à l'adresse suivante : http://www.ainc-inac.gc.ca/pr/pub/wf/index-fra.php).

Bulletin de recherche sur les politiques de santé

Les avis exprimés dans les articles, notamment en ce qui concerne l'interprétation des données, appartiennent aux auteurs et ne peuvent être considérés comme des positions officielles de Santé Canada.

La présente publication est offerte en d'autres formats sur demande.

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Publié sous l'autorité du ministre de la Santé.

© Sa Majesté la Reine du Chef du Canada, représentée par le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux Canada, 2002

ISSN 1499-3503 (En ligne)

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Travailler de concert pour remédier aux problèmes de santé de la population autochtone

L'article qui suit a été rédigé à partir d'un entretien avec Ian Potter, sous-ministre adjoint de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada. L'entretien a été effectué par Linda Senzilet, directrice-rédactrice en chef du présent numéro du Bulletin de recherche sur les politiques de santé. Un merci spécial à Franca Santagati, du Bureau du sous-ministre adjoint, de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada, pour sa précieuse aide.

Les données révèlent abondamment que l'état de santé des membres des Premières Nations et des Inuits n'est pas le même que celui de l'ensemble de la population canadienne. Quelles sont les disparités sur le plan de la santé et à quoi peut-on les attribuer?

Il est vrai que les membres des Premières Nations et les Inuits ont depuis longtemps une moins bonne santé que le reste de la population canadienne. La population autochtone présente en effet des taux disproportionnés de maladies infectieuses, de blessures, de suicides, de maladies cardiaques et de diabète (voir l'article de la page 6). Bien qu'il y ait eu des améliorations au cours des dernières années en ce qui a trait à l'espérance de vie et à la mortalité infantile des Autochtones, ces derniers demeurent beaucoup plus vulnérables à la maladie que l'ensemble de la population. Par conséquent, les chercheurs et les responsables des politiques continuent de porter une attention particulière à la question.

Bien sûr, il n'y a pas de solution toute faite aux disparités persistantes, mais il peut être pertinent de se pencher sur certains facteurs. Tout d'abord, les Autochtones subissent des iniquités, comme des logements de moindre qualité, un milieu physique plus pauvre, un niveau de scolarité et un statut socioéconomique inférieurs, moins de possibilités de travail et des infrastructures communautaires fragiles, qui sont autant de facteurs déterminants sur le plan de la santé. Pour que surviennent des améliorations permanentes, les Premières Nations et les Inuits doivent avoir accès à un environnement sain, à de l'eau potable et à l'éducation. Ensuite, intervient le facteur géographique : de nombreux Autochtones vivent dans de petites collectivités rurales et éloignées, où l'accès aux services de santé est limité (voir les figures 1 et 2).

Figure 1 : Taille de la population - Premières Nations et InuitsNote de bas de page 1 


Soixante-dix-sept pour cent des collectivités autochtones et inuites qui habitent au sud du 60e parallèle comptent moins de 1 000 habitants. L'éventail de services de base varie selon le degré d'isolement et d'accessibilité des collectivités.

Figure 1 : Taille de la population - Premières Nations et Inuits

Pour appuyer cette partie de l'article, le diagramme circulaire de la figure 1 montre la répartition des membres des Premières nations et des Inuits selon la taille de la collectivité. Plus particulièrement, le diagramme circulaire montre que 77 % des collectivités des Premières nations et des collectivités inuites ont moins de 1 000 habitants. Seulement 2 % des collectivités des Premières nations et des collectivités inuites ont plus de 3 000 habitants, 43 % des collectivités ont moins de 400 habitants, 34 % ont entre 401 et 1 000 habitants et 21 % des collectivités ont entre 1 001 et 3 000 habitants. Ce diagramme démontre que la plupart des membres des Premières nations et des Inuits habitent dans des petites collectivités.

Figure 2 : Degré d'isolement des collectivités des Premières Nations et des InuitsNote de bas de page 2 

Figure 2 : Degré d'isolement des collectivités des Premières Nations et des Inuits

Les deux diagrammes à barres de la figure 2 illustrent le degré d'isolement des collectivités des Premières nations et des Inuits. Les quatre catégories suivantes de collectivités ont été établies afin de refléter les degrés variés d'isolement et d'accessibilité : Éloignées et isolées : aucun vol régulier, service téléphonique ou radio minimum et aucun accès routier Isolées : vols réguliers, services téléphoniques adéquats et accès routier à certaines périodes de l'année Semi-isolées : accès routier à des services médicaux à plus de 90 km Non isolées : accès routier à des services médicaux à moins de 90 km Sur le premier diagramme, 65 % des collectivités de Premières nations sont non isolées, 16 % des collectivités sont semi-isolées, 15 % des collectivités sont isolées et 4 % des collectivités sont éloignées et isolées. Le deuxième diagramme montre que 10 % des collectivités inuites sont non isolées, 0 % sont semi-isolées, 90 % sont isolées et 0 % des collectivités inuites sont éloignées et isolées. Ces deux diagrammes démontrent donc que la majorité des collectivités des Premières nations ont un accès routier à des services médicaux à moins de 90 km, mais que la majorité des collectivités inuites n'ont pas un accès routier toute l'année.

On distingue quatre types de collectivités selon les divers degrés d'isolement et d'accessibilité :

  • Non isolées : accès routier à des services médicaux à moins de 90 kilomètres
  • Semi-isolées : accès routier à des services médicaux à plus de 90 kilomètres
  • Isolées : vols réguliers, services téléphoniques adéquats, accès routier certaines périodes de l'année
  • Éloignées-isolées : aucun vol régulier, service téléphonique ou radio minimum, aucun accès routier

Les donnés sur le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest ne sont pas incluses.

En quoi le fait de travailler de concert avec les Premières Nations et les Inuits peut-il contribuer à remédier aux disparités existantes? Qui doit s'engager dans cette démarche?

Les collectivités diffèrent grandement entre elles et chacune a des besoins particuliers en matière de santé. C'est pour cette raison, entre autres, que la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (DGSPNI) appuie l'engagement direct des collectivités autochtones et inuites sur le plan de la conception et de la responsabilité des programmes de santé. La participation des collectivités est effectivement essentielle si l'on veut remédier aux disparités en matière de santé. Le projet d'Eskasoni, en Nouvelle-Écosse, est un excellent exemple d'une approche multisectorielle efficace en fait de soins de santé primaires (voir l'article de la page 14).

À la DGSPNI, notre mandat se présente en trois volets : aider les Premières Nations et les Inuits à atteindre un niveau de santé comparable à celui des autres Canadiens; assurer l'accès de ces populations à des services de santé permanents; et mettre en place des moyens d'action adéquats en matière de santé dans les collectivités des Premières Nations et inuites. À cette fin, la Direction générale travaille de concert avec les organismes autochtones à l'échelle nationale, provinciale, régionale et tribale. Sur le plan fédéral, l'Assemblée des Premières Nations et Inuit Tapiriit Kanatami siègent au comité exécutif de la Direction générale. Tous les bureaux régionaux de la DGSPNI possèdent un réseau élaboré de comités conjoints constitué de groupes autochtones et inuits régionaux qui planifient et gèrent les programmes offerts. En outre, des représentants des Premières Nations et des Inuits font partie de la majorité des comités directeurs de nos programmes.

Les organisations autochtones travaillent également avec d'autres directions générales de Santé Canada. Par exemple, les membres de certaines collectivités autochtones participent présentement à une évaluation de l'efficacité du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones dans les collectivités urbaines et nordiques, qui est financé par la Direction générale de la santé de la population et de la santé publique (voir l'article de la page 17).

Pourquoi est-il si important que les Autochtones et les Inuits aient accès à des services de santé adaptés à leur culture?

Les peuples autochtones et inuits perçoivent la santé de façon holistique, donc comme le produit d'un ensemble de facteurs interreliés et influencés par l'aspect psychique, physique, spirituel, affectif, et par le contexte familial et communautaire de l'être. Cette perspective n'est pas sans rapport avec la définition de la santé que donne l'Organisation mondiale de la Santé : « état complet de bien-être physique, psychologique et affectif ».

Pour guérir quelqu'un ou préserver sa santé, on doit tenir compte de sa culture. Ainsi, dans toute collectivité, le système de santé en place doit favoriser la conception et l'exécution de programmes adéquats sur le plan culturel; il s'agit de tenir compte des coutumes, des priorités, des langues, de l'alimentation, des ressources et des caractéristiques particulières des localités visées.

L'Initiative sur le diabète chez les Autochtones de Santé Canada est un bon exemple de programme adapté aux réalités culturelles des Autochtones. Il fonctionne selon une approche globale et intégrée favorisant la collaboration afin de réduire l'incidence du diabète et des maladies connexes chez les peuples autochtones. (L'article de la page 20 porte sur l'importance de soins de santé adaptés sur le plan culturel.)

Au cours des dernières années, on a transféré aux collectivités autochtones et inuites la responsabilité de nombreux programmes et services de santé. Comment ce transfert s'est-il effectué?

Le concept du transfert des programmes et services de santé s'est transformé au cours des 30 dernières années (voir l'article de la page 11). La première étape de cette progression a suivi la publication, en 1975, d'un document intitulé Relations entre le gouvernement canadien et les Indiens canadiens, qui établissait un cadre stratégique visant un contrôle accru des programmes et services par les Indiens. Par conséquent, les trois quarts des bandes ont pris la responsabilité de programmes comme le Programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les Autochtones (PNLAADA) et le Programme de représentants en santé communautaire.

À la suite de la publication de la Politique de 1979 sur la santé des Indiens, qui reconnaissait que les membres des Premières Nations et des collectivités inuites pouvaient assumer la responsabilité de tout aspect de la gestion de leurs programmes de santé communautaire, Santé Canada a mis en place des projets pilotes dans diverses collectivités. Ces expériences ont jeté les bases du processus de transfert des services de santé, qui a commencé en 1989. Lorsqu'on a procédé à l'évaluation du processus en question - au début et au milieu des années 90 - on a conclu que le transfert réussissait à permettre aux Premières Nations et aux Inuits de concevoir des programmes et de répartir des fonds selon les priorités de leurs collectivités. Le processus de transfert avait également d'autres avantages pour les collectivités en question, comme une sensibilisation accrue aux enjeux sanitaires, une meilleure intégration des programmes aux services sociaux et aux secteurs de l'éducation et de la justice, et un plus grand nombre de programmes axés sur la culture.

En janvier 2002, 70 pour cent des collectivités autochtones et inuites admissibles avaient un certain degré de responsabilité par rapport à la gestion de leurs programmes communautaires de santé. De ce nombre, 47 pour cent, c'est-à-dire environ 283 collectivités, assumaient l'ensemble des activités de gestion des programmes de santé, tandis que 23 pour cent exerçaient un contrôle plus restreint.

Quels types de décisions les responsables des politiques doivent-ils prendre en ce qui a trait à la prestation de services de santé aux Premières Nations et aux Inuits? En quoi la recherche stratégique effectuée par le passé a-t-elle influencé ces décisions, et quel type de recherche stratégique devrait-on entreprendre pour orienter le processus décisionnel à l'avenir?

Les décideurs qui oeuvrent dans le domaine de la santé des Premières Nations et des Inuits font face aux mêmes types de décision que ceux qui travaillent dans l'ensemble du système de santé. On parle notamment de répartir équitablement les ressources dans les divers programmes et activités, de déterminer la relation de cause à effet en ce qui a trait aux maladies et aux incapacités et de relever les moyens d'intervention les plus efficaces pour promouvoir la santé et remédier à la maladie.

Le gouvernement a récemment décidé d'appuyer la mise en place de l'Organisation nationale de la santé autochtone (ONSA) et de l'Institut de la santé des Autochtones (ISA) dans le réseau des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Il s'agit d'étapes positives dans la mesure où elles favorisent de nouvelles connaissances ainsi que le renforcement des liens entre la recherche et les orientations stratégiques. Par exemple, les recherches portant sur les liens entre la cohésion sociale et la santé ont considérablement influencé l'orientation stratégique actuelle et ont favorisé le contrôle des programmes de santé à l'échelle communautaire.

Enfin, nous avons l'occasion de pousser plus loin les recherches pour remédier à certains problèmes comme les maladies chroniques et les contaminants de l'environnement. Nous aurons peut-être à adapter notre façon de fonctionner, particulièrement dans les très petites collectivités où les approches conventionnelles ne seront peut-être pas indiquées. En résumé, nos décisions stratégiques doivent continuer de se fonder sur les preuves fournies par nos partenaires de recherche, et être prises en collaboration avec les personnes, les collectivités et les organismes des Premières Nations et des Inuits.

Point sur l'état de santé des membres des Premières Nations au Canada

Adam Probert et Robert Poirier Direction des politiques, de la planification et de l'analyse stratégique, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada

*Voir la définition des termes qui paraissent en gras à la fin de l'article.

Quel que soit leur âge, les membres des Premières Nations ont une moins bonne santé que le reste de la population canadienne. En outre, il existe des disparités importantes au sein des populations elles-mêmes : on le constate en observant le profil sanitaire selon le sexe, l'âge et le lieu de résidence. L'amélioration de la santé des peuples des Premières Nations repose nécessairement sur l'accès à des données pertinentes.

Comment se comparent les Premières Nations et l'ensemble de la population canadienne?

Les membres des Premières Nations qui vivent dans les réserves En 2000, l'espérance de vie, à la naissance, des hommes et des femmes des Premières Nations du Canada était respectivement de 68,9 et de 76,6 ans, tandis qu'elle était de 76,3 ans pour les hommes et de 81,8 ans pour les femmes au sein de la population canadienne*. Malgré ces écarts, l'espérance de vie des populations autochtones a considérablement augmenté depuis 1980 : on note une hausse de 8,0 ans pour les hommes et de 8,6 ans pour les femmesNote de bas de page 3.

Le taux de mortalité normalisé selon l'âge de 1999 chez les peuples des Premières Nations a surpassé celui de 1998 applicable à la population canadienne pour ce qui est des décès liés aux causes suivantes : troubles du système endocrinien et immunitaire, de l'appareil digestif, blessures et empoisonnement. Après la normalisation selon l'âge du taux de décès chez les Premières Nations par rapport à la population canadienne de 1991, on a noté que les maladies du système circulatoire surpassent les blessures comme cause première de mortalité. Cela tient au fait que, dans l'ensemble, la population canadienne est plus âgée que la population des Premières Nations et que les troubles du système circulatoire affectent plus souvent les personnes âgées.

En 1999, le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les troubles du système endocrinien et immunitaire (incluant les décès liés au diabète) était 1,5 fois plus élevé chez les Premières Nations. L'incidence du diabète dans les collectivités des Premières Nations est d'autant plus marquée lorsqu'on tient compte du « taux » de prévalence du diabète, normalisé selon l'âge, chez les membres des Premières Nations. Quelle que soit leur catégorie d'âge ou leur sexe, le taux de prévalence du diabète est de trois à cinq fois plus élevé chez les Autochtones que dans l'ensemble de la population canadienneNote de bas de page 4. On s'inquiète particulièrement de la hausse de l'incidence du diabète type 2, que l'on diagnostique maintenant chez les jeunes enfants de 5 à 8 ans, alors que seuls les adultes en souffraient jusqu'à récemmentNote de bas de page 5, Note de bas de page 6.

Le taux de mortalité lié aux blessures et à l'empoisonnement est 2,9 fois plus élevé chez les Premières Nations que dans l'ensemble de la population canadienne. En Colombie-Britannique, de 1991 à 1997, la population des Premières Nations comptait huit fois plus de décès liés aux incendies, quatre fois plus de noyades, cinq fois plus d'homicides et trois fois plus de chutes mortelles que l'ensemble des résidents de la provinceNote de bas de page 7 . En 1997, le taux de tuberculose parmi les membres des Premières Nations était huit fois plus élevé que dans l'ensemble de la population canadienne. La surpopulation des logements dans bien des collectivités explique en partie ce taux, dans la mesure où le risque d'exposition à des personnes infectées est plus élevé qu'ailleurs (voir la figure 1)Note de bas de page Note de bas de page 8 . De plus, les personnes qui vivent dans des endroits surpeuplés sont plus susceptibles de contracter la tuberculose puisqu'elles sont davantage exposées aux facteurs de risque que sont la pauvreté, la vie en région éloignée, l'abus d'alcool et d'autres drogues et diverses maladies sous-jacentes. Les collectivités où les logements sont surpeuplés, le système d'évacuation des eaux usées inadéquat et l'eau courante inexistante, présentent également des risques accrus d'éclosion d'hépatite A. La figure 2 révèle les taux de certaines maladies infectieuses chez les Premières Nations et dans l'ensemble de la population canadienneNote de bas de page .Note de bas de page 9  (Voir aussi l'article sur la shigellose dans le Bulletin de recherche sur les politiques de santé, numéro 4, p. 15.) La figure ne révèle pas l'incidence de la chlamydia en 1999, qui était sept fois plus élevée chez les Premières Nations vivant dans les réserves que dans l'ensemble de la population canadienne.

Figure 1 : Population totale et incidence de la tuberculose selon la densité de logement dans les collectivités répertoriées, 1997-1999Note de bas de page

Figure 1 : Population totale et incidence de la tuberculose selon la densité de logement dans les collectivités répertoriées, 1997-1999

Le diagramme à barres de la figure 3 illustre les premières causes de décès - normalisées selon l'âge - chez les Premières nations en 1999 et au Canada en 1998, par 1 000 personnes. L'axe vertical représente le nombre de décès dans la population par 1 000 personnes. L'axe horizontal énumère les maladies pour les Premières nations et pour l'ensemble de la population canadienne. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies liées à l'endocrine et au système immunitaire est responsable de 32,6 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 22 décès sur 1 000 au Canada. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies digestives est responsable de 33 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 23,8 décès sur 1 000 au Canada. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies respiratoires est responsable de 63,6 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 63,4 décès sur 1 000 chez la population canadienne. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les blessures et l'empoisonnement est responsable de 123,9 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 42,2 décès sur 1 000 au Canada. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les tumeurs ou le cancer est responsable de 141,5 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 186,5 décès sur 1 000 au Canada. Enfin, le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies du système circulatoire est de 213,6 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 231,8 décès sur 1 000 au Canada. Globalement, le diagramme montre que les maladies cardiovasculaires étaient la première cause de décès, suivies du cancer et ensuite des blessures et de l'empoisonnement. Pour toutes les causes de décès à l'exception des maladies cardiovasculaire et du cancer, le taux de mortalité chez les Premières nations était plus élevé que le taux national.

Figure 2 : Cas répertoriés de certaines maladies infectieuses au sein des Premières Nations vivant dans les réserves et de la population canadienne dans son ensemble 1999

Figure 2 : Cas répertoriés de certaines maladies infectieuses au sein des Premières Nations vivant dans les réserves et de la population canadienne dans son ensemble 1999

Il est important de noter que les données sur les maladies infectieuses n'étaient pas disponibles pour 47 des 144 collectivités de l'Ontario et pour 29 des 41 collectivités du Québec. Le diagramme à barres de la figure 2 illustre diverses maladies infectieuses chez les Premières nations vivant dans les réserves et chez l'ensemble de la population canadienne en 1999, sur 100 000 personnes. L'axe vertical représente le taux de maladie par 100 000 personnes. L'axe horizontal énumère les diverses maladies infectieuses. Le diagramme montre, par exemple, que le taux de coqueluche est de 57,6 personnes sur 100 000 des Premières nations habitant dans les réserves et de 20 personnes sur 100 000 chez le reste de la population canadienne. Vingt-six virgule huit personnes sur 100 000 des Premières nations souffrent de lambliase, comparativement à 17,2 personnes sur 100 000 chez la population générale. Quinze virgule quatre personnes sur 100 000 des Premières nations habitant dans les réserves sont atteintes d'hépatite A, comparativement à 2,9 personnes sur 100 000 dans la population générale. Soixante-neuf virgule six personnes sur 100 000 des Premières nations habitant dans les réserves souffrent de shigellose, comparativement à 3,6 personnes sur 100 000 dans la population générale. Zéro personnes sur 100 000 des Premières nations habitant dans les réserves sont atteintes d'une infection à E. Coli producteur de vérotoxine, comparativement à 4,9 personnes sur 100 000 dans la population générale. Enfin, 55,3 personnes sur 100 000 des Premières nations habitant dans les réserves sont atteintes de la tuberculose, comparativement à 6,6 personnes sur 100 000 chez la population canadienne. Il est à noter que les preuves concernant la tuberculose sont fondées sur des données recensées en 1997. Globalement, le diagramme montre que les maladies infectieuses sont beaucoup plus prévalentes dans les collectivités des Premières nations que chez la population canadienne en général.

À propos des données

Les statistiques dont on fait état dans le présent article ont été recueillies en 1999 et figureront sous peu, sauf indication contraire, dans Profil statistique de la santé des Premières Nations au Canada rapport publié en 2003 par Santé CanadaNote de bas de page 10. Mentionnons également que les statistiques provenant de la Colombie-Britannique et de l'Alberta concernent exclusivement les Indiens inscrits à l'échelle de la province (qu'ils vivent dans les réserves ou non). La plupart des provinces ont mis en place des mécanismes de transmission de données relativement à tous ou à quelques indicateurs seulement. Malheureusement, très peu de renseignements concernant la santé des Inuits sont systématiquement recueillis et transmis à Santé Canada. Certains gouvernements, dont celui du Québec, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, fournissent des données sur la santé de l'ensemble des résidents. Ainsi, le présent document ne contient pas de renseignements sur l'état de santé spécifique des Inuits.

Les Autochtones vivant hors des réserves

L'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) menée en 2000-2001 par Statistique Canada comparait l'état de santé autodéclaré des Autochtones vivant hors des réserves et l'état de santé autodéclaré des non-Autochtones qui vivent dans les mêmes collectivités urbaines, rurales et territorialesNote de bas de page 11. La population autochtone vivant hors des réserves signale un niveau de scolarité et un revenu par ménage moins élevé, des taux plus élevés de tabagisme, d'alcoolisme et d'obésité et des taux moins élevés d'activité physique. Même en mesurant la situation socioéconomique et les comportements sanitaires, on constate que les Autochtones vivant hors des réserves sont beaucoup plus à risque que les non-Autochtones en ce qui a trait aux facteurs suivants : état de santé autodéclaré « passable » ou « faible »; présence de plusieurs maladies chroniques; épisode dépressif majeur au cours de la dernière année. Le taux de prévalence du diabète chez les Autochtones vivant hors des réserves était deux fois plus élevé qu'au sein de la population non autochtone.

Variations de l'état de santé chez les Premières Nations

Selon le sexe

En 1999, chez les Premières Nations, le taux brut de mortalité des hommes était de 30 pour cent plus élevé que celui des femmes, un écart largement attribuable à un taux plus élevé de blessures contractées intentionnellement ou non par les hommes. Les causes les plus fréquentes de décès par blessure chez les hommes étaient le suicide, les accidents de véhicules automobiles, la suffocation et la noyade ainsi que les homicides. Les maladies du système circulatoire constituaient la deuxième cause de décès en importance.

Les maladies du système circulatoire constituent la première cause de décès des femmes des Premières Nations, suivies de près par les blessures et l'empoisonnement. Ensemble, ces deux catégories représentent presque la moitié des causes de décès chez les femmes. Précisons que les femmes sont plus susceptibles de mourir dans un accident de véhicule motorisé que par suicide. Comme c'est le cas au sein de la population canadienne, les taux de suicide entraînant la mort sont beaucoup plus élevés chez les hommes des Premières Nations que chez les femmes, bien que les femmes fassent beaucoup plus de tentatives de suicide que les hommes1Note de bas de page 12.

En 1999, le taux de décès attribuable au diabète était de 26,8 pour cent plus élevé chez les femmes autochtones que chez les hommes. Chez les Premières Nations, environ les deux tiers des diabétiques sont des femmes Note de bas de page 13, tandis qu'au sein de la population canadienne, le diabète s'attaque davantage aux hommes qu'aux femmesNote de bas de page 14.

Selon le groupe d'âge

La figure 3 révèle les premières causes de décès qui surviennent au sein de la population canadienne et des Premières Nations qui vivent dans les réservesNote de bas de page 15 . Lorsque le taux de mortalité est normalisé selon l'âge, les maladies du système circulatoire arrivent au premier rang des causes de décès, suivies par le cancer et les blessures. Pour toutes les causes de décès sauf le cancer et les maladies du système circulatoire, le taux de mortalité est plus élevé chez les Premières Nations que dans l'ensemble de la population canadienne, après rajustements des chiffres en fonction des différences d'âge.

Figure 3 : Premières causes de décès - normalisées selon l'âge - chez les Premières Nations, 1999, et dans l'ensemble du Canada, 1998


Classement fondé sur le taux de mortalité (par tranche de 100 000 personnes) des Premières Nations en 1999.

Figure 3 : Premières causes de décès - normalisées selon l'âge - chez les Premières Nations, 1999, et dans l'ensemble du Canada, 1998

Le diagramme à barres de la figure 3 illustre les premières causes de décès - normalisées selon l'âge - chez les Premières nations en 1999 et au Canada en 1998, par 1 000 personnes. L'axe vertical représente le nombre de décès dans la population par 1 000 personnes. L'axe horizontal énumère les maladies pour les Premières nations et pour l'ensemble de la population canadienne. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies liées à l'endocrine et au système immunitaire est responsable de 32,6 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 22 décès sur 1 000 au Canada. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies digestives est responsable de 33 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 23,8 décès sur 1 000 au Canada. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies respiratoires est responsable de 63,6 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 63,4 décès sur 1 000 chez la population canadienne. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les blessures et l'empoisonnement est responsable de 123,9 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 42,2 décès sur 1 000 au Canada. Le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les tumeurs ou le cancer est responsable de 141,5 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 186,5 décès sur 1 000 au Canada. Enfin, le taux de mortalité normalisé selon l'âge pour les maladies du système circulatoire est de 213,6 décès sur 1 000 chez les Premières nations et de 231,8 décès sur 1 000 au Canada. Globalement, le diagramme montre que les maladies cardiovasculaires étaient la première cause de décès, suivies du cancer et ensuite des blessures et de l'empoisonnement. Pour toutes les causes de décès à l'exception des maladies cardiovasculaire et du cancer, le taux de mortalité chez les Premières nations était plus élevé que le taux national.

On utilise souvent les statistiques relevant les années potentielles de vie perdues (APVP) pour illustrer les causes de décès prématuré. (Veuillez consulter le Bulletin de recherche sur les politiques de santé, numéro 3, p. 32, pour une description détaillée du concept des APVP)Note de bas de page 16 . Par exemple, si une personne de 20 ans meurt accidentellement, elle perd 55 années potentielles de vie (dans la mesure où l'espérance de vie à la naissance est de 75 ans). Les blessures ont une incidence majeure sur les APVP si on les compare aux autres causes de décès, puisqu'elles arrivent à tout âge, tandis que beaucoup d'autres causes de décès sont associées au vieillissement (voir la figure 4)Note de bas de page 17 Note de bas de page .

Figure 4 : Années potentielles de vie perdues (APVP) selon les causes de décès pour les Premières Nations et la population canadienne, 1999

Figure 4 : Années potentielles de vie perdues (APVP) selon les causes de décès pour les Premières Nations et la population canadienne, 1999

L'histogramme de la figure 4 montre les années potentielles de vie perdues, par 100 000 personnes, pour des raisons médicales chez les Premières nations et chez la population canadienne dans l'ensemble en 1999. Les maladies figurent sur l'axe vertical, et les années potentielles de vie perdues (APVP) sont représentées par l'axe horixontal pour les Premières nations, les Inuits et le Canada. Le diagramme indique les choses suivantes : Pour l'hémopathie, les APVP chez les Premières nations sont de 10 personnes sur 100 000, et de 17 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies infectieuses, les APVP chez les Premières nations sont de 42 personnes sur 100 000, et de 114 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies génito-urinaires, les APVP chez les Premières nations sont de 45 personnes sur 100 000, et de 39 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies musculosquelettiques, les APVP chez les Premières nations sont de 70 personnes sur 100 000, et de 16 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies du système nerveux, les APVP chez les Premières nations sont de 137 personnes sur 100 000, et de 144 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies mentales, les APVP chez les Premières nations sont de 142 personnes sur 100 000, et de 60 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies du système endocrinien, les APVP chez les Premières nations sont de 225 personnes sur 100 000, et de 148 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies respiratoires, les APVP chez les Premières nations sont de 247 personnes sur 100 000, et de 201 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies digestives, les APVP chez les Premières nations sont de 280 personnes sur 100 000, et de 177 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les anomalies congénitales, les APVP chez les Premières nations sont de 293 personnes sur 100 000, et de 178 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies atypiques, les APVP chez les Premières nations sont de 294 personnes sur 100 000, et de 130 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies périnatales, les APVP chez les Premières nations sont de 329 personnes sur 100 000, et de 211 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les néoplasmes, les APVP chez les Premières nations sont de 770 personnes sur 100 000, et de 1 617 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les maladies du système circulatoire, les APVP chez les Premières nations sont de 900 personnes sur 100 000, et de 961 personnes sur 100 000 au Canada. Pour les blessures, les APVP chez les Premières nations sont de 4 909 personnes sur 100 000, et de 1 271 personnes sur 100 000 au Canada. En se fondant sur cet histogramme, on peut conclure que, pour presque toutes les grandes maladies, le nombre d'APVP est beaucoup plus élevé chez les Premières nations que chez la population canadienne générale.

Les causes de décès les plus fréquentes chez les membres des Premières Nations âgés de 1 à 44 ans sont les blessures et l'empoisonnement. Chez les enfants, ces décès ne sont pas intentionnels. Toutefois, les blessures et l'empoisonnement intentionnels comptent pour 38 pour cent des décès chez les jeunes (de 10 à 19 ans), et pour 23 pour cent des décès chez les jeunes adultes (de 20 à 44 ans). Les accidents de véhicules motorisés constituent une des premières causes de décès dans toutes les catégories d'âge sauf chez les aînés. Une réduction même infime du taux de mortalité par blessure chez les Premières Nations aurait une incidence profonde sur les décès prématurés et la santé de la population autochtone dans son ensemble.

Selon le lieu

Selon une étude effectuée au Manitoba, le taux de diabète varie chez les Premières Nations en fonction des régions de la province où ils habitentNote de bas de page 18  : le taux de diabète atteint 25 pour cent dans certains conseils tribaux du nord, mais il n'est que de 15 pour cent dans certains conseils tribaux du sud (un conseil tribal est un groupe régional constitué d'Autochtones qui offre des services généraux à ses membres). Pour l'ensemble de la province, le taux de prévalence du diabète dans les réserves est de 20,3 pour cent, tandis qu'elle est de 17 pour cent hors des réserves.

Le taux d'hospitalisation lié à des blessures est presque deux fois plus élevé parmi les conseils tribaux du nord que parmi ceux du sud, et presque de 23 pour cent plus élevé chez les Autochtones qui vivent dans les réserves que chez ceux qui vivent hors des réserves.Cependant, le taux de décès prématuré et les APVP sont plus élevés, et l'espérance de vie est plus faible dans le sud, en dépit d'un accès aux services de santé généralement meilleur. L'étude en question, réalisée au Manitoba, souligne l'importance de facteurs autres que l'accès aux services de santé pour décrire la santé et le bien-être des membres des Premières Nations.

Pourquoi est-il important d'avoir accès à des données fiables?

La Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (DGSPNI) de Santé Canada administre l'un des plus grands programmes de santé publique et de soins primaires au Canada, c'est-à-dire qu'elle offre des services à environ 400 000 membres des Premières Nations vivant dans 640 collectivités, et qu'elle fournit des services de santé non assurés à 300 000 membres des Premières Nations vivant hors des réserves et Inuits. S'il est vrai qu'il existe des disparités significatives entre les données sur la santé des Premières Nations et des Inuits qui doivent être clarifiées, l'information existante sur l'état de santé des Premières Nations aide la DGSPNI à s'acquitter de son mandat.

Recueillir des renseignements précis sur la santé des Premières Nations ne se fait pas sans difficultés. Certaines figurent plus en détail dans l'article intitulé « Le couplage des dossiers » (voir la page 30). Néanmoins, pour comprendre l'état de santé des Premières Nations, on doit absolument disposer de données exactes et à jour sur la santé. Santé Canada utilise les données qu'il recueille pour évaluer les besoins nationaux et régionaux en matière d'information sur la santé des Premières Nations qui vivent dans les réserves. Le Ministère recueille également des données pertinentes au moyen des systèmes existants de surveillance à l'échelle du Canada, ce qui lui permet de comparer les résultats sur la santé parmi certaines populations, et de relever de nouvelles priorités. Ce type de renseignements est aussi utile pour les professionnels de la santé, les chercheurs, les dirigeants communautaires et les responsables des politiques dans le cadre de leur propre planification communautaire et régionale du système de santé.

Les auteurs remercient de leur contribution les membres des bureaux régionaux de la DGSPNI qui se sont particulièrement investis pour la collecte et l'analyse des données sur la santé utilisées dans l'article : John David Martin (région du Pacifique), Marion Perrin (région de l'Alberta), Lynda Kushnir-Pekrul (région de la Saskatchewan), Suzanne Martel (région du Manitoba), Nicolette Kaszor (région de l'Ontario), Marino Argentin (région du Québec) et Susan Ross (région de l'Atlantique).

Glossaire

Normalisation selon l'âge

Méthode statistique de rajustement des taux (p. ex., le taux de mortalité) conçue pour réduire au minimum les différences d'âge lorsqu'on compare les taux de populations différentesNote de bas de page 19. Par exemple, la population des Premières Nations est beaucoup plus jeune que l'ensemble de la population canadienne. Aux fins du présent article, on a normalisé les âges des deux populations en fonction du profil de la population canadienne de 1991.

Population canadienne

La population totale du Canada (ou le groupe précis auquel on renvoie en fonction de l'âge ou du sexe), incluant la composante Premières Nations de cette population.

Taux brut de mortalité

Portion estimée d'une population qui meurt au cours d'une période donnée. Le numérateur désigne le nombre de personnes qui décèderont au cours de la période fixée, tandis que le dénominateur représente la taille de la population, qui correspond de façon générale à la population moyenneNote de bas de page 19. Le taux brut de mortalité n'est pas normalisé selon l'âge, et on l'exprime souvent en indiquant le nombre de décès par tranche de 100 000 personnes par année.

Incidence

L'incidence de nouveaux événements (diagnostics de maladies, de suicides par exemple) survenu au sein d'une population précise pendant une période déterminéeNote de bas de page 19. On exprime souvent l'incidence par tranches de 100 000 personnes par année. Par exemple, en 1999, parmi une population de 100 000 membres des Premières Nations, on a diagnostiqué la tuberculose chez 61,5 d'entre eux.

« Taux » de prévalence

La portion d'une population susceptible de tomber malade ou compte tenu d'un moment précis (ou durant une période donnée) est déjà atteinte de la maladie à ce moment-là (ou pendant cette période)Note de bas de page 19. On exprime souvent le taux de prévalence en indiquant le nombre de personnes concernées sur 100 000 personnes. Par exemple, une enquête transversale pourrait nous permettre d'établir le nombre de diabétiques sur une population de 100 000 personnes. (Consulter également à ce sujet le Bulletin de recherche sur les politiques de santé, numéro 1, p. 18.)

Surveillance

La surveillance désigne la collecte de données en cours d'exécution ainsi que l'examen, l'analyse et la diffusion des résultats en matière d'incidence de maladie, de prévalence, d'hospitalisation et de décès. Les mécanismes de surveillance peuvent également servir à recueillir des informations concernant les connaissances, les attitudes et les comportements de la population relativement aux pratiques qui visent à prévenir le cancer, à faciliter le dépistage, et à améliorer la durée de la survie ainsi que la qualité de la vie. (Consulter également le Bulletin de recherche sur les politiques de santé, numéro 4, p. 25.)

Évolution du contrôle des programmes de santé communautaire

Mark Wigmore, Direction des affaires intergouvernementales, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Santé Canada, anciennement de la Direction des politiques de la planification et de l'analyse stratégiques, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada, et Keith Conn, Direction des programmes communautaires, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada

Au cours des 10 dernières années, Santé Canada a noué de nouvelles relations avec les collectivités des Premières nations et inuites par l'entremise de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (DGSPNI). Beaucoup d'ententes visant l'amélioration de l'état de santé de ces populations favorisaient une prise de contrôle des programmes de santé par les collectivités visées, ce qui leur permettrait de mieux répondre aux besoins locaux.

Depuis 10 ans, on a vu le rôle de la DGSPNI passer de la prestation de services à un éventail plus large d'activités : financement, expertise en matière de santé, cadre stratégique, structure de programme et autres mécanismes de soutien des collectivités qui assument une responsabilité de plus en plus importante en matière de prestations des soins, dans le but d'obtenir de meilleurs résultats sur le plan de la santé.

Comment s'est effectué le transfert des services?

Jusqu'aux années 70, il revenait aux employés fédéraux d'offrir les services de santé publique et de prévention à toutes les collectivités des Premières Nations et inuites ainsi que les soins de première ligne aux collectivités éloignées et isolées.

L'engagement accru des collectivités autochtones et inuites dans la prestation des services de santé a commencé dans la foulée de la politique de 1979 sur la santé des Indiens, qui avait pour objectif d'aider les collectivités indiennes à améliorer et à consolider leur état de santé. La politique était axée sur trois idées maîtresses :

  • la mise en valeur des aspects socioéconomiques, culturels et spirituels de la collectivité
  • la relation de longue date entre les populations indiennes et le gouvernement fédéral (une relation qui serait renforcée lorsqu'on encouragerait les populations visées à s'engager davantage envers la planification, la budgetisation et la prestation des services de santé)
  • le système de santé canadien (composé de nombreux éléments interreliés qui tombent sous la responsabilité des gouvernements fédéral ou provinciaux ou des autorités municipales, des bandes indiennes ou du secteur privé)

Environ 10 ans après la mise en vigueur de la politique sur la santé des Indiens, le gouvernement fédéral a donné son aval à un cadre stratégique de transfert des responsabilités en matière de santé en vertu duquel les collectivités du sud du 60e parallèle qui le désiraient pouvaient prendre la responsabilité des ressources liées aux programmes de santé communautaire. On continuait aussi à aider les gouvernements territoriaux du nord du 60e parallèle à assumer la responsabilité de la prestation des soins de santé.

La décision de transférer les responsabilités en matière de santé aux collectivités des Premières Nations et des Inuits constituait le point culminant de nombreuses années de discussion entre le gouvernement fédéral et les collectivités - discussions qui se poursuivent toujours. Aujourd'hui, plus de 80 pour cent des fonds destinés aux programmes fédéraux de santé communautaire sont attribués à des organismes des Premières Nations ou Inuits en vertu d'ententes précises. La gestion directe de ces programmes et services par le gouvernement fédéral est de plus en plus rare. Les collectivités des Premières Nations embauchent maintenant la majorité de leurs infirmières en santé communautaire, de leurs intervenants en toxicomanie et de leurs travailleurs communautaires. En outre, des programmes de santé sont gérés par des directeurs communautaires dans la plupart des collectivités des Premières Nations. (En outre, le gouvernement fédéral est toujours responsable du Programme des services de santé non assurés tandis que les provinces et les territoires assurent les soins hospitaliers et médicaux.)

« Même si des services médicaux sont désormais dispensés aux Autochtones dans les régions les plus retirées du pays ... le fossé qui sépare les Autochtones et les non-Autochtones en matière de santé reste énome. »

Commission royale sur les peuples autochtones, Rapport final, 1996, vol.3

En quoi l'état de santé s'est-il amélioré?

On justifie en partie la responsabilisation grandissante des collectivités concernées en matière de prestation de soins de santé communautaires en invoquant le fait que les organismes gérés par les Premières Nations et les Inuits sont les mieux placés pour comprendre les besoins de leurs collectivités, gérer les services de santé et en assurer la prestation. À ce jour, les effets mesurables du contrôle local de l'état de santé sont encourageants. Selon une évaluation à long terme menée par Santé Canada en juin 1994, le transfert du contrôle de la gestion en matière de santé a favorisé une sensibilisation accrue aux enjeux sanitaires chez les membres de la collectivité ainsi qu'une prestation de soins de santé davantage adaptée à la culture autochtone. On remarquait également que les soins de santé sont devenus davantage prioritaires aux yeux des collectivités viséesNote de bas de page 20.

Une autre étude effectuée en Colombie-Britannique fait état d'incidences positivesNote de bas de page 21. Les collectivités de la Colombie-Britannique qui sont autonomes ou qui gèrent elles-mêmes leur système de santé, leur éducation et d'autres services ont un taux de suicide beaucoup moins élevé que celles qui n'ont pas le même degré de contrôle ou de responsabilité. Il faut effectuer davantage de recherches stratégiques sur l'incidence du contrôle local des soins de santé au regard de l'état de santé; toutefois, il importe de reconnaître que bien des facteurs associés à un état de santé déficient ne tiennent pas qu'à la prestation des services. En fait, que l'on se place du point de vue des gouvernements et des facteurs déterminants en matière de santé (de la population), ou que l'on perçoive la situation dans une optique holistique de la santé au même titre que bien des Premières Nations et des Inuits, on reconnaît que, pour que la santé des Autochtones soit meilleure, il faudra améliorer la qualité et la quantité de l'eau, l'éducation, l'emploi et le logement. Il va de soi que l'engagement des Premières Nations et des Inuits à élaborer leurs propres solutions - sur le plan des soins de santé ou d'autres facteurs déterminants en matière de santé - continuera de faire partie intégrante de la stratégie de la Commission royale sur les peuples autochtones, que le gouvernement fédéral s'est engagé à réaliser.

« Le gouvernement prendra des mesures additionnelles pour réduire l'écart entre l'état de santé des Autochtones et des non Autochtones. A cette fin, on mettra en place une stratégie de promotion de la santé et de prévention des maladies chez les Premières Nations qui comprendra un programme d'immunisation adapté. Il travaillera aussi avec ses partenaires pour améliorer la prestation des services de soins de santé dans les réserves »

Discours du Trône, 30 septembre 2002

Perspective historique : Transfert du contrôle des programmes de santé communautaire aux collectivités des Premières Nations et des Inuits
1969 1970 1975 1979
Le Livre blanc sur la politique relative aux Indiens propose que le gouvernement fédéral ne soit plus responsable des Premières Nations et que le statut spécial des Indiens soit révoqué Publication du Livre rouge des Indiens (en réaction au livre blanc, les Premières Nations revendiquent la conservation du statut spécial mais une plus grande responsabilité à l'égard des programmes et services communautaires) Publication du document Relations entre le gouvernement canadien et les Autochtones canadiens (cadre stratégique pour renforcer les pouvoirs des Indiens) La politique fédérale sur la santé des Indiens (qui a pour objectif d'aider les collectivités indiennes à améliorer leur état de santé pour ensuite conserver leurs acquis sur ce plan) reconnaît que les Indiens peuvent assumer la responsabilité de la gestion de tous les aspects de leurs programmes de santé communautaire
1983-1986 1988 1988-1989 juillet 1989
Santé Canada met de l'avant un certain nombre de projets pilotes en matière de santé communautaire afin de fournir au gouvernement fédéral et aux autorités des Premières Nations les renseignements dont ils ont besoin en ce qui a trait au contrôle des services de santé par les Premières Nations elles-mêmes L'Entente de transfert finale confère la responsabilité des programmes universels de santé au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.), de sorte que les Premières Nations et les Inuits des T.N.-O. continuent d'avoir accès à tous les nouveaux programmes fédéraux qui les concernent Le cabinet et le Conseil du Trésor autorisent le transfert des responsabilités en matière de santé au sud du 60e parallèle (on met en place le cadre stratégique, les pouvoirs financiers et les ressources pour transférer la responsabilité des programmes de santé communautaire aux collectivités indiennes au sud du 60e parallèle) Le premier conseil tribal signe une entente de transfert des services en matière de santé
1994 1995 1997 avril 1999
Le Conseil du Trésor confère aux autorités compétentes les ressources et les pouvoirs requis pour appuyer une approche de services intégrés en santé communautaire (une solution de rechange pour les bandes qui ne sont pas prêtes à mettre en place un programme de transfert, ou qui ne sont pas intéressées à le faire) La Politique sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale reconnaît que les Autochtones ont un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale en vertu de l'article 35 de la Constitution Le territoire du Yukon reprend la gestion des programmes universels de santé et à assurer leur prestation sur le territoire du Yukon, en s'assurant que les Premières Nations du Yukon continuent d'avoir accès à tout nouveau programme fédéral visant les Premières Nations et les Inuits Le territoire du Nunavut voit le jour, et les modalités de l'entente de transfert finale émises en 1988 pour les Territoires du Nord-Ouest s'appliquent au gouvernement du Nunavut

Projet sur les soins primaires à Eskasoni

Nicki Sims-Jones Programme de la sécurité des milieux, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs, Santé Canada; anciennement de la Direction des politiques, de la planification et de l'analyse stratégique, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada

Le projet sur les soins primaires d'Eskasoni a adopté un modèle multisectoriel et multidisciplinaire de soins de santé primaires dans une collectivité des Premières Nations, qui requiert les compétences de médecins de famille salariés ainsi que des services de soins infirmiers, d'éducation en matière de santé, de nutrition et pharmaceutiques. La présente étude de cas est essentiellement élaborée à partir du rapport d'évaluation rédigé en 2001 par Mary-Jane Hampton de Santé CanadaNote de bas de page 22.

Une occasion de changement

On a laissé entendre que si des améliorations doivent être apportées aux soins de santé primaires, il est peu probable qu'ils émanent d'une réforme de grande envergure. On croit plutôt que les responsables des politiques effectueront des changements à mesure qu'ils relèveront des occasions d'apporter des changements graduelsNote de bas de page 23. Ce type d'occasion s'est présenté à Eskasoni, où on a mis en oeuvre le projet sur les soins primaires (PSP) en 1999 dans la foulée d'une collaboration multisectorielle.

Eskasoni, collectivité des Premières Nations de 3 200 habitants, est située au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse. On y retrouve une population jeune et peu de personnes âgées; effectivement, presque la moitié (48 pour cent) des résidents ont moins de 20 ans. On encourage les enfants à parler Mi'kmaq et on leur enseigne leur culture à l'école et à la maison.

La collectivité fait face à des taux particulièrement élevés de maladie et de décès liés à la toxicomanie et à des maladies chroniques comme le diabète, les maladies du coeur et les affections respiratoires. On remarque un taux élevé de dépendance à diverses substances, surtout aux médicaments d'ordonnance. Soixante pour cent des adultes fument la cigarette, c'est-à-dire presque deux fois plus que l'ensemble de la province (33 pour cent). En outre, 40 pour cent des résidents d'Eskasoni sont diabétiquesNote de bas de page 22.

Historique des services de santé

Eskasoni gère ses propres services de santé communautaire depuis 1997. Le centre de référence le plus important pour la collectivité est situé à Sydney, à environ 40 minutes d'Eskasoni.

Soins primaires

Avant 1995, jusqu'à quatre médecins rémunérés à l'acte en vertu d'un système financé par la province offraient des soins primaires à Eskasoni; ensuite, la collectivité a bénéficié des services d'un seul médecin qui travaillait trois jours par semaine. Les résidents allaient consulter un médecin en moyenne 11 fois par année (incluant les visites des médecins pratiquant en dehors de la réserve), en partie à cause d'une exigence du programme fédéral des services de santé non assurés selon laquelle les patients devaient obtenir une ordonnance pour se procurer des médicaments normalement en vente libre. Il semble en outre que les femmes enceintes recevaient peu de soins avant leur accouchement, quand elles en recevaient.

Programmes et services de santé communautaire

Avant la mise en oeuvre du PSP, les résidents d'Eskasoni pouvaient se prévaloir d'une gamme de services communautaires par l'entremise des programmes de santé communautaire de Santé Canada : soins infirmiers communautaires, éducation nutritionnelle liée à la grossesse, contrôle des maladies transmissibles et programme d'immunisation. Ces programmes, hébergés dans le bureau du conseil de bande, fonctionnaient de façon distincte, c'est-à-dire qu'il n'y avait aucune coordination ni avec les autres programmes ni avec les médecins de la collectivité. En fait, même si on embauchait des représentants en santé communautaire pour faire le lien entre les membres de la collectivité et les fournisseurs de soins de santé, les deux groupes communiquaient peu.

Agents de changement

Deux facteurs clés sont à l'origine des changements apportés au système de soins de santé primaires d'Eskasoni. D'abord, mentionnons la collaboration entre les trois ordres de gouvernement et l'Université Dalhousie pour améliorer les services de santé communautaire. Du côté du gouvernement, la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (DGSPNI) a fourni les ressources financières et le soutien technique requis pour le projet. Pour sa part, le ministère de la Santé de la Nouvelle-Écosse a conclu des ententes assurant des services médicaux à la collectivité. Le conseil de bande d'Eskasoni - qui en était à perfectionner ses compétences administratives dans la foulée du programme de transfert des responsabilités lancé en 1997 - a appuyé le nouveau modèle de soins primaires et a participé à la planification et à la gestion du projet. La faculté de médecine générale de l'Université Dalhousie a recruté des médecins salariés pour prendre la relève du médecin rémunéré à l'acte qui prenait sa retraite, et a fait d'Eskasoni un lieu d'enseignement pratique qui est aussi le seul site de télémédecine communautaire de la province.

Le projet a été rendu possible grâce à un autre facteur : le financement offert par le Fonds pour l'adaptation des services de santé (FASS) de Santé Canada. Créé en 1997 pour soutenir l'innovation et l'amélioration de secteurs cruciaux du système de santé, le FASS a assumé les frais de transition du projet et a agi comme catalyseur pour amener les partenaires à travailler ensembleNote de bas de page 24

Modèle d'Eskasoni

Le modèle de soins primaires d'Eskasoni comporte quatre éléments clés :

  • Le processus de transfert des responsabilités administratives des soins de santé primaires au conseil de bande d'Eskasoni s'est poursuivi durant la réalisation du projet (et il est toujours en cours). On a déployé des efforts pour intégrer les principaux éléments des services offerts par l'équipe de soins primaires et les professionnels de santé communautaire - par exemple, les dossiers des patients.
  • Les services médicaux ne fonctionnent plus selon le même modèle : on est passé d'un système de rémunération à l'acte à une approche multidisciplinaire globale en vertu de laquelle tous les membres de l'équipe formée sont salariés, y compris les médecins. Dans une collectivité où le taux de prévalence des maladies chroniques est élevé, la prestation efficace des soins primaires dépend largement des médecins salariés, dans la mesure où ces derniers peuvent consacrer du temps aux soins préventifs, à l'évaluation des patients et à la gestion interdisciplinaire de cas complexesNote de bas de page 23.
  • On a construit un nouveau complexe de soins de santé à l'aide du financement offert par les gouvernements fédéral et provincial. Les deux ordres de gouvernement désiraient s'assurer que leur part respective des coûts de construction servirait à mettre des installations à la disposition de leur personnel et serait utilisée aux fins de leur programme : c'est pourquoi on a construit deux immeubles distincts, côte à côte et reliés par une porte attenante.
  • On a établi des partenariats avec des centres de santé régionaux afin de faciliter l'aiguillage vers des services médicaux et autres (diagnostiques, etc.) à l'extérieur de la collectivité.

Incidences préliminaires

On a entrepris d'évaluer le PSP 18 mois après le début du projet. Même si les résultats sont très préliminaires et qu'il est encore trop tôt pour en évaluer les effets sur le plan de la santé, on remarque néanmoins certains résultats encourageants à court et moyen termes, notamment :

  • Une utilisation plus adéquate des services médicaux et hospitaliers. Par exemple, le nombre moyen de consultations médicales annuelles par résident est passé de 11 à quatre, tandis que le nombre de visites aux urgences de l'hôpital régional a chuté de 40 pour cent. Ces diminutions sont en partie attribuables à l'accès accru de la collectivité à une équipe multidisciplinaire de soins de santé (disponible cinq jours par semaine au lieu de trois).
  • Une satisfaction très élevée à l'échelle de la collectivité. Quatre-vingt-neuf pour cent des résidents croient que la qualité des services de santé d'Eskasoni s'est améliorée si on la compare au contexte d'il y a cinq ans.
  • Un nombre plus élevé de recommandations interdisciplinaires et un éventail accru de services de première ligne. Par exemple, les généralistes locaux recommandent aux patients huit fois plus qu'avant de consulter la nutritionniste ou un éducateur sanitaire pour le traitement de leur diabète. En outre, l'accès à des soins spécialisés est facilité par les visites à domicile et la télémédecine.
  • Des habitudes différentes en matière d'ordonnance. On a prescrit moins d'antibiotiques, d'antihistaminiques et d'antitussifs, ce qui a réduit le coût des ordonnances assumé par la collectivité et le Programme des services de santé non assurés.
  • Une amélioration des soins prénataux. Presque toutes les femmes enceintes (96 pour cent) ont reçu les soins appropriés de la part des médecins et des autres membres de l'équipe multidisciplinaire au cours de leur grossesse, de leur accouchement et de la période post-partum.
  • Une intégration des soins primaires et du personnel de santé communautaire. On a d'abord constaté que le personnel financé par les gouvernements fédéral et provincial continuait de travailler en vase clos, bien qu'on ait entrepris de fusionner les dossiers de chacun des patients. Toutefois, des renseignements récents indiquent que les membres du personnel travaillent maintenant en collaboration plus étroiteNote de bas de page 25. Par exemple, on recommande aujourd'hui régulièrement aux femmes d'avoir recours aux services communautaires financés par le fédéral pour obtenir des renseignements sur la vie prénatale. Grâce à ces services et aux soins prénataux améliorés décrits plus haut, le personnel hospitalier estime aujourd'hui que la plupart des femmes enceintes de la collectivité sont peu à risque parce qu'elles sont adéquatement préparées au travail et à l'accouchement.

Qu'avons-nous appris?

L'expérience d'Eskasoni nous a fourni beaucoup d'occasions d'apprendre comment on peut améliorer l'efficacité des services de santé dans les collectivités des Premières Nations.

Équipe de soins primaires

Moins de consultations médicales, davantage de patients dirigés vers des nutritionnistes, amélioration des soins prénataux, sont autant d'indicateurs précoces de retombées positives engendrées par la présence de l'équipe multidisciplinaire de soins primaires.

Économies relatives aux soins de santé à l'échelle provinciale

Les coûts liés au système de santé à l'échelle de la province ont considérablement chuté lorsque les dépenses associées à la rémunération des médecins et au fonctionnement des salles d'urgence ont diminué. Toutefois, les pratiques budgétaires en vigueur nous interdisaient d'utiliser les économies réalisées pour soutenir les membres de l'équipe multidisciplinaire autres que les médecins. Les restrictions liées aux transferts de fonds entre le système de rémunération à l'acte et les nouveaux modèles de soins primaires sont susceptibles d'empêcher l'adoption généralisée de ce type de modèle à l'avenir.

Collaboration multisectorielle

Parmi les thèmes associés à la politique fédérale sur la santé et ayant reçu une attention grandissante au cours des 25 dernières années, on retrouve la nécessité d'une collaboration entre les secteurs d'activité au moment d'élaborer des politiques touchant la santé Note de bas de page 26. Pour que le projet réussisse, il était essentiel que les trois ordres de gouvernement et les résidents d'Eskasoni désirent travailler ensemble. En outre, la participation de l'Université Dalhousie nous a permis de recruter, dans le cadre du projet, des médecins ouverts à de nouvelles méthodes de rémunération.

Modèle pour l'avenir?

Bien que le projet sur les soins primaires ne bénéficie plus des fonds du FASS, il continue de fonctionner grâce au financement des provinces et des programmes communautaires de Santé Canada.

Le projet d'Eskasoni est un excellent exemple du type de changement graduel que l'on propose dans le cadre de la réforme du système de soins de santé primairesNote de bas de page 23. Si on se fie à ce que le projet d'Eskasoni laisse entrevoir, la réforme des soins de santé au Canada se produira vraisemblablement une collectivité à la fois, à mesure que surviendront des occasions de changement graduel.

Évaluation participative du Programme d'aide préscolaire aux Autochtones

David Hubka, PhD Division de l'enfance et de l'adolescence, Centre du développement humain en santé, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique, Santé Canada

Le Programme d'aide préscolaire aux Autochtones (PAPA) dans les collectivités urbaines et nordiques résulte de la collaboration entre la Direction générale de la santé de la population et de la santé publique de Santé Canada et les groupes communautaires autochtones des collectivités urbaines et nordiques. Son objectif premier est de montrer que les stratégies d'intervention précoce conçues et gérées à l'échelle locale peuvent avoir des effets positifs sur les enfants autochtones en leur permettant d'acquérir une bonne image d'eux-mêmes, d'entretenir un désir d'apprentissage continu et de s'épanouir pleinement en tant que jeunesNote de bas de page 27. Au moyen de ce programme, Santé Canada cherche également à améliorer l'état de santé des populations autochtones en leur donnant un meilleur accès au système scolaire et à d'autres ressources communautaires. Les évaluations participatives nationales sont essentielles à la réalisation de tous ces objectifs.

Contexte

Le PAPA est un programme de développement de la petite enfance qui vise les Premières Nations, les Inuits et les Métis âgés de 6 ans et moins ainsi que leur famille. Les bénéficiaires du programme vivent en dehors des réserves. Depuis le lancement du PAPA en 1996, le projet a été mis en oeuvre à 114 endroits : plus de 3 500 enfants ont bénéficié du projet dans des collectivités urbaines et nordiques de huit provinces et de trois territoires. Le PAPA accepte autant d'enfants et de familles autochtones, inuites et métisses qu'il est possible d'en accueillir.

Composantes du programme

Le programme permet généralement aux jeunes enfants autochtones d'expérimenter des demi-journées en milieu préscolaire, ce qui les prépare à l'école en favorisant leur épanouissement spirituel, intellectuel, physique et affectif. Chacun des projets reflète la culture et la langue locale et se concentre sur les six composantes suivantes : promotion de la santé, nutrition, préparation à l'école et à l'apprentissage, culture et langue, engagement des parents et soutien social. Ces composantes sont susceptibles d'avoir une incidence positive sur les enfants autochtones à de nombreux égards, notamment en ce qui a trait aux aspects sociaux et éducatifs. En outre, dans la mesure où des facteurs comme la nutrition et l'acquisition d'une formation jouent un rôle déterminant sur le plan de la santé, on espère qu'elles contribueront à améliorer l'état de santé des populations visées. (Voir l'encadré concernant les facteurs déterminants en matière de santé à la page 21.)

Bien des données portent à croire que l'acquisition de comportements sains dans la jeune enfance a une incidence positive sur la santé à des étapes subséquentes de la vieNote de bas de page 28. Ces comportements sains pourraient empêcher l'apparition de maladies comme le diabète de type 2 ou diabète non insulino-dépendant. Depuis quelques années, on remarque une augmentation de l'incidence du diabète de type 2, même chez les enfants autochtones : on a effectivement diagnostiqué ce type de diabète chez des jeunes de 5 à 8 ans (voir l'article de la page 6). Le processus de prévention primaire de la maladie vise l'amélioration du régime alimentaire et l'intensification des activités physiques, qui sont toutes deux des composantes du PAPA. En tant que programme communautaire, le PAPA tient compte des besoins particuliers de chacune des collectivités. Effectivement, dans la mesure où le programme vise entre autres à montrer l'efficacité des stratégies d'intervention précoce conçues et gérées à l'échelle locale, chacun des projets du PAPA est dirigé par des organismes autochtones locaux sans but lucratif. Dans le cadre de la réalisation du projet, on doit tenir compte des six composantes préétablies; cependant, il revient à l'organisme promoteur de préciser le contenu exact du projet. On incite également les parents et les tuteurs à jouer un rôle clé dans l'élaboration du programme.

Évaluation participative

Les évaluations nationales constituent un moyen efficace de vérifier l'efficacité des programmes du PAPA et d'en améliorer la mise en oeuvre. Pour des programmes comme le PAPA, en vertu desquels chacune des collectivités assume la responsabilité de l'élaboration d'un programme précis, la participation des collectivités hôtes est essentielle à tous les stades du processus d'évaluation si l'on veut améliorer l'efficacité du programme. Cette démarche produira des résultats positifs, notamment sur le plan de l'état de santé.

Le PAPA fait présentement l'objet de deux types d'évaluation. D'abord, on recueille des informations sur les activités offertes et la participation au programme; en outre, on évalue l'impact du PAPA à l'échelle nationale en essayant de déterminer en quoi le programme modifie le quotidien des enfants, de leurs parents et des collectivités touchées. Santé Canada offre une formation dans les sites locaux afin de permettre aux intervenants concernés de participer aux évaluations et de collaborer avec les collectivités hôtes tout au long du processus d'évaluation.

Bien que les résultats des enquêtes administratives initiales aient déjà été publiés de façon systématiqueNote de bas de page 29, Note de bas de page 31., l'évaluation se poursuit. La première évaluation nationale de l'impact a été entamée au cours de l'hiver 2002 : on a soumis les outils d'évaluation à un test pilote dans plusieurs sites à l'échelle du Canada. Tous les groupes intéressés au programme - y compris les parents, les promoteurs et les équipes sur le terrain - participent à la conception des outils et des indicateurs nécessaires à l'évaluation, et à la description du processus de réaction à l'évaluation. Le programme est relativement nouveau, et il faudra un certain temps pour en mesurer précisément les retombées. C'est pourquoi l'évaluation exhaustive doit s'effectuer sur plusieurs années.

Il est parfois difficile d'évaluer l'incidence d'un programme comme le PAPA, même si on peut comprendre, de façon théorique et intuitive, les avantages à long terme de l'éducation préscolaire. La situation est attribuable au fait que, pour mesurer l'efficacité d'un programme comme le PAPA, on doit avoir recours à des outils et à des méthodes élaborées et adaptées à la culture de la population cible, tandis que pour évaluer d'autres programmes comme celui de nutrition prénatale, il suffit d'utiliser les indicateurs réguliers de la santé infantile, tel le poids à la naissance. En outre, les outils d'évaluation doivent refléter la diversité des collectivités du PAPA et des objectifs qu'elles se fixent relativement à leurs programmes.

Malgré les difficultés relevées, les résultats des évaluations du processus et de l'administration effectuées en 1999 et en 2000 donnent à croire que les activités du programme dans les secteurs de la promotion de la santé et de la nutrition ont un effet positif sur les populations cibles (voir l'encadré de la page 19).

Avantages de l'évaluation participative

La participation de la collectivité est une composante importante de tous les stades du PAPA, notamment des évaluations à l'échelle nationale. Les évaluations participatives, scientifiquement valables et culturellement appropriées, tiennent compte de tous les aspects du programme et de la perception holistique du développement de l'enfant. De plus, la formation offerte au personnel du PAPA et aux familles participantes a permis de renforcer la qualité des évaluations, et favorisera aussi, dans l'avenir, une amélioration des programmes et de l'état de santé des collectivités du PAPA. Les évaluations participatives permettront également aux collectivités visées d'accroître leurs moyens d'action dans les champs de compétence pertinents Note de bas de page 32.

Un autre des avantages liés à l'approche participative d'évaluation des programmes du PAPA est l'élaboration d'un mécanisme visant à ce que les indicateurs et les outils de mesure soient établis en fonction des besoins particuliers des collectivités visées. Les participants suggèrent la mise en place d'indicateurs axés sur la culture - p. ex., parents qui défendent la mémoire linguistique autochtone et les collectivités solidaires et coopérativesNote de bas de page 33. Maintenant, le défi consiste à mesurer ces concepts avec précision de sorte à fournir des renseignements adéquats aux collectivités.

Conclusions tirées des évaluations du processus et de l'administration

« Les dossiers familiaux ou le journal de l'enfant ou de sa famille révèlent des changements d'attitude, de comportements et d'apparence physique . . . Les enfants s'habituent à se laver les mains et à se brosser les dents de leur propre chef, ils font plus d'activité physique, prennent de meilleures décisions quant à leur alimentation et évitent d'emprunter les chapeaux ou les vêtements des autres enfants »Note de bas de page 34. [Traduction]

« Le personnel note que les parents semblent mieux connaître les composantes d'un régime alimentaire sain, et que le programme de cuisine collective attire plus de participants . . . De plus, les enfants nous renseignent de leur propre chef sur ce qu'ils mangent à la maison et parlent de façon positive des nouveaux aliments qu'ils découvrent »Note de bas de page 35. [Traduction]

« Les responsables de 23 sites signalent qu'ils portent maintenant une attention particulière à la planification des menus ou qu'ils ont apporté des améliorations importantes à leurs menus. Onze autres sites indiquent qu'ils ont mis en place des repas-partage et des cuisines collectives, et certains arrivent à organiser des ateliers ou à accroître l'engagement des parents relativement à la composante de la nutrition. Deux sites précisent que des changements sont survenus sur le plan de la nutrition grâce au renforcement des partenariats, à l'accroissement des ressources et du personnel et aux changements apportés au programme pour inclure la nutrition. En outre, un site indique qu'il a mis en place un bingo alimentaire »Note de bas de page 36. [Traduction]

« La très grande majorité des sites (90 pour cent) signalent qu'on parle une langue autochtone en classe tous les jours »Note de bas de page 37.

Le PAPA a également contribué au renforcement des capacités communautaires dans le secteur de l'intégration intersectorielle. Dans le cadre de l'initiative fédérale gérée en fonction des champs de compétence provinciaux et territoriaux de la santé et de l'éducation, les projets du PAPA sont réalisés en collaboration avec d'autres programmes et services offerts dans la collectivité. Ainsi, les participants connaissent mieux l'éventail de services dont ils peuvent se prévaloir - par exemple, quelques sites du PAPA partagent leurs locaux avec des services de garderie autorisés. Cette conjugaison de services devrait également nous permettre de réaliser l'objectif du PAPA qui consiste à jeter les bases du soutien social, facteur déterminant de la santé.

Conclusion

Dans l'ensemble, le processus d'évaluation a reçu un appui enthousiaste de la part des sites participants ainsi que du personnel et des membres des collectivités visées. Par exemple, à l'automne 2002, on n'a pas pu répondre à la demande de tous les sites qui désiraient participer aux évaluations pilotes. De plus, après avoir constaté le succès du PAPA et l'enthousiasme suscité par le programme, on a mis en place une initiative similaire visant les enfants des Premières Nations âgés de 6 ans et moins qui vivent dans les réserves. Lancée en 1998, l'initiative du PAPA dans les réserves est gérée par la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada, et favorise l'élaboration de projets locaux gérés par les collectivités des Premières Nations. L'initiative compte environ 305 projets conçus et gérés par les collectivités des Premières Nations : environ 7 700 enfants des Premières Nations bénéficient de ce programmeNote de bas de page 38. À première vue, il semble que la participation de la collectivité constitue aussi un élément essentiel de l'initiative du PAPA dans les réserves; en outre, l'initiative a mené à l'élaboration d'un nombre accru de programmes complets et intégrés visant les enfants des réserves.

Les évaluateurs du PAPA dans les collectivités urbaines et nordiques conseillent la mise en oeuvre généralisée de ce type d'évaluation participative, puisqu'on a prouvé qu'elle peut répondre aux besoins des participants, des bailleurs de fonds fédéraux, des universitaires et des chercheurs, tout en respectant le mode de vie autochtoneNote de bas de page 32. Bien qu'on n'ait pas encore réussi à prouver les retombées positives à long terme du PAPA sur la santé de la population, certains détails comme ceux relevés ci-dessus sont autant d'indicateurs précoces qui laissent entrevoir des avantages à moyen terme pour les enfants autochtones. On prévoit que les améliorations qui seront apportées à moyen terme aux comportements sanitaires et alimentaires mèneront à des résultats plus concluants à long terme sur le plan de la santé. D'ici là, il est clair que les membres de la collectivité ont un rôle important à jouer dans l'établissement de leurs propres besoins, l'évaluation de l'efficacité du programme au regard de ces besoins et la mise en oeuvre des modifications appropriées.

Importance de la culture pour la santé et les soins de santé des Autochtones

Tracey Spack, PhD Direction des produits de santé naturels, Direction générale des produits de santé et des aliments, Santé Canada, ex-membre de la Direction des politiques, de la planification et de l'analyse stratégiques, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada

Bon nombre de peuples des Premières Nations envisagent la santé du point de vue holistique; dans certaines collectivités, le cercle d'influences médicales revêt d'ailleurs ce caractère. Ce concept est fondé sur la croyance selon laquelle l'harmonie entre les aspects physique, mental, affectif et spirituel d'une personne est gage de bonne santé. Tous ces éléments sont interreliés : s'il existe un déséquilibre ou un problème pour l'un, tous les autres risquent d'être touchés. La philosophie inuite de la santé est également fondée sur l'équilibre des aspects mental, physique et spirituel de l'être. Lorsque l'un de ces éléments est touché, cette approche propose d'orienter les interventions surtout en ce sensNote de bas de page 39. On constate de plus en plus que les programmes de soins de santé axés sur la culture peuvent avoir des effets bénéfiques sur la santé des Autochtones.

La culture, un déterminant de la santé

Le rapport Lalonde de 1974Note de bas de page 40 a reconnu officiellement pour la première fois que la santé des Canadiens est déterminée non seulement par les services de santé qu'ils reçoivent, mais aussi par des facteurs génétiques, environnementaux et autres que biologiques. Comme l'importance de facteurs considérés jusque-là comme ne faisant pas partie du programme de santé s'est fait de plus en plus sentir, Santé Canada a adopté un nouveau modèle de santé de la population au milieu des années 1990. Celui-ci est fondé sur 12 déterminants de la santé, dont la culture; d'après les chercheurs, tous ont une influence sur l'état de santé. (Voir la liste de ces déterminants dans l'encadré de la page 21.)

Selon le concept de santé de la population, les 12 déterminants de la santé n'agissent pas isolément. Au contraire, leur interaction complexe influe sur la santé. La culture, par exemple, modifie sensiblement la façon dont les gens interagissent avec le système de soins de santé; elle détermine leur participation aux programmes de prévention des maladies et de promotion de la santé, l'accès qu'ils pourront avoir aux renseignements sur la santé, les choix qu'ils poseront pour s'assurer un mode de vie sain, leur compréhension de la santé et de la maladie, et ce qui constituera pour eux des priorités dans les domaines de la santé et de la bonne condition physiqueNote de bas de page 41.

Qu'est-ce qui détermine la santéNote de bas de page 44?

  • le revenu et la situation sociale
  • les réseaux de soutien social
  • l'éducation
  • les conditions d'emploi/de travail
  • les milieux sociaux
  • les milieux physiques
  • les pratiques de santé personnelles et les capacités d'adaptation
  • le bon développement des enfants
  • le bagage biologique et génétique
  • les services de santé
  • le sexe
  • la culture

Quelle importance revêt la culture?

Depuis 20 ans, plusieurs études ont révélé l'importance de la culture pour la santé et les soins de santé des Autochtones. Morse et coll.Note de bas de page 42 sont arrivés à la conclusion selon laquelle les Autochtones du Canada sont souvent insatisfaits du système biomédical moderne; ils lui reprochent d'accorder une importance superficielle à l'approche holistique et de s'attendre à ce que les gens considèrent leurs soins de santé de façon passive, au lieu d'y prendre une part active.

Comme certains professionnels de la santé du domaine biomédical possèdent une connaissance plutôt restreinte des cultures autochtones, il peut toujours leur arriver de ne pas discerner certains problèmes de santé, de poser un mauvais diagnostic et de proposer un traitement inadéquatNote de bas de page 43. Selon une étude, les psychiatres décrivent souvent les enfants autochtones comme étant « passifs, difficiles à évaluer et peu ouverts »; dans cette même étude, on rapporte aussi que des psychiatres diagnostiquent parfois une psychopathologie, au lieu d'envisager la possibilité que ce comportement soit tout simplement le reflet d'une appartenance à une culture autochtoneNote de bas de page 45. Une autre étude, fondée sur l'analyse comparative de dossiers d'admission, pour des problèmes psychiatriques, d'Autochtones et de non-Autochtones dans un hôpital du Nord-ouest de l'Ontario, révèle que certains Autochtones admis pour toxicomanie auraient été diagnostiqués par erreur comme étant dépressifsNote de bas de page 46.

La médecine autochtone traditionnelle s'est révélée efficace pour traiter de nombreux troubles de santé psychiques et physiques. Par exemple, l'utilisation de la médecine traditionnelle dans le cadre des programmes de désintoxication a permis d'accroître la sobriété, l'emploi, l'éducation et le revenuNote de bas de page 47. De même, les sueries traditionnelles ont donné des résultats notoires dans le traitement de la dépression et la prévention du suicideNote de bas de page 48. Une étude effectuée à l'Université de l'Alberta a révélé que les méthodes autochtones traditionnelles étaient aussi efficaces, sinon plus, que celles du domaine biomédical pour soigner le psoriasisNote de bas de page 49.

Les Autochtones s'expriment

Comme l'illustrent les exemples suivants, les services de santé axés sur la culture sont fortement soutenus par les collectivités et les organisations autochtones :

  • Les deux tiers des répondants de l'Enquête régionale sur la santé des Premières Nations et des Inuits effectuée en 1997 estiment que la spiritualité, les cérémonies et les pratiques de santé traditionnelles revêtent de plus en plus d'importance au sein des collectivités des Premières Nations et des InuitsNote de bas de page 50;
  • Au cours de l'audience de la Commission royale sur les peuples autochtones (CRPA) de 1996, des témoins ont demandé de faire des recommandations « visant à protéger et à élargir le rôle de la guérison ainsi que les valeurs et les pratiques traditionnelles dans les soins de santé et les services sociaux contemporains »; en outre, ils ont déclaré que « l'intégration des pratiques de guérison et de la spiritualité traditionnelles à même les services sociaux et médicaux, constituait le chaînon manquant grâce auquel les Autochtones accepteraient de se prévaloir de ces services »Note de bas de page 51;
  • Les participants à la tribune autochtone de 2002, qui était coprésidée par la Commission Romanow et l'Organisation nationale de la santé des Autochtones, ont recommandé que les politiques en matière de santé soient adaptées à chaque groupe culturel, et que les pratiques traditionnelles soient reconnues et utilisées à plus grande échelleNote de bas de page 52.

Intégration des approches traditionnelles et biomédicales

Selon la CRPA les guérisseurs autochtones se considèrent comme des spécialistes de la santé; ils travaillent en collaboration avec le système biomédical en aiguillant leurs clients dans ce domaine et en les aidant à bien suivre leur traitement. Les ouvrages portant sur la question montrent que ce modèle est le plus susceptible de produire un système de santé qui donne de bons résultatsNote de bas de page 53, Note de bas de page 55.

Jusqu'à ce jour, l'intégration des approches traditionnelles et biomédicales utilisées pour offrir des programmes et services de santé s'est effectuée dans quelques régions à l'intérieur des systèmes de soins de santé fédéral, provinciaux et territoriaux. Le programme des services de santé non assurés de Santé Canada fournit le transport, les repas et l'hébergement aux clients admissibles qui doivent se déplacer pour consulter un guérisseur traditionnel. De plus, l'Initiative sur le diabète chez les Autochtones encourage les collectivités à offrir des programmes et des services qui tiennent compte des croyances et pratiques traditionnelles; elle permet aussi de garantir que les Autochtones participent à toutes les étapes de l'élaboration, de l'application et de l'exécution des programmes.

En 1991, le ministère de la Santé de l'Ontario a approuvé des lignes directrices stratégiques portant sur la diversité culturelle dont doivent être prises en compte dans l'élaboration des programmes et services de santéNote de bas de page 56. Les sages-femmes et les guérisseurs autochtones des réserves de l'Ontario ne sont pas liés par les règlements établis relativement aux professions du domaine de la santé. De même, l'accord de transfert conclu avec le Yukon comporte un programme de médecine traditionnelle et de diététique dispensé à l'Hôpital général de Whitehorse.

Outre ces politiques gouvernementales destinées à favoriser l'intégration, les collectivités ont aussi pris des mesures pour intégrer les approches traditionnelles et biomédicales. Deux bons exemples de réussite dans ce domaine sont le programme destiné aux sages-femmes inuites offert à Puvirnituq et le projet de prévention du diabète conduit dans les écoles de Kahnawake.

Programme destiné aux sages-femmes inuites

Dans les années 1970, le gouvernement fédéral estimait que toutes les parturientes des Premières Nations et des Inuits devaient accoucher à l'hôpital. Cette approche laissait peu de place aux pratiques des sages-femmes inuites traditionnelles et à leur transmission ce qui obligeait les femmes enceintes à passer beaucoup de temps loin de chez elles. Pour régler ce problème, les Inuits de Puvirnituq, dans le Nord du Québec, ont aidé les fournisseurs de soins de santé à établir, en 1986, l'Inuulitsivik Maternity Centre. Ce centre de maternité montre bien que les approches inuites traditionnelles dans le domaine de la santé peuvent être intégrées sans problème à l'ensemble du système médical. En raison du succès qu'a connu ce projet, d'autres collectivités inuites ont ouvert leur propre centre de maternité ou prévoient le faire bientôt.

Projet de prévention du diabète dans les écoles de Kahnawake

En 1994, l'augmentation inquiétante de l'obésité chez les enfants ainsi que la tradition mohawk qui consiste à penser au bien-être des générations futures sont autant de facteurs qui ont incité les promoteurs gouvernementaux, les chercheurs et les membres de la collectivité de Kahnawake à élaborer ensemble un programme de prévention du diabète de type 2. Ce projet, qui vise à accroître l'activité physique et à favoriser des habitudes alimentaires plus saines, allie efficacement un style d'apprentissage axé sur la culture à un modèle de planification de la promotion de la santéNote de bas de page 57.

La phase préliminaire du programme, qui était financée par l'ancien Programme national de recherche et de développement en matière de santé de Santé Canada (PNRDS), n'a pas duré assez longtemps pour permettre de voir si l'incidence du diabète de type 2 avait diminué. Les responsables de l'Initiative sur le diabète chez les Autochtones de Santé Canada travaillent actuellement de concert avec un certain nombre de fondations privées afin d'obtenir une aide financière pour cette initiative et mener une évaluation plus approfondie du programme et de ses résultats sur la santé.

Relever les défis

Bon nombre de guérisseurs traditionnels ne veulent pas que leurs pratiques et services soient régis de façon officielleNote de bas de page 51, car ils croient que le caractère légitime de leur système et de leur rôle de praticien traditionnel en souffrirait. En outre, cela reviendrait à dire que la valeur médicale d'un système traditionnel peut en quelque sorte être séparé de sa valeur culturelle. Certains chercheurs en sont venus à la conclusion que les guérisseurs traditionnels devraient vérifier dans quelle mesure leurs interventions sont efficaces en fonction de normes biomédicalesNote de bas de page 58. Cette opinion n'est toutefois pas partagée par certains praticiens traditionnels, pour qui l'efficacité des interventions est une évidence qui découle de centaines voire de milliers d'années d'expérience transmises de génération en génération.

Que fait Santé Canada?

L'une des activités du ministère porte sur les produits de santé naturels. En avril 2002, la Direction générale des produits de santé naturels (DPSN) parrainait une table ronde autochtone pour discuter de la réglementation des produits de santé naturels, y compris les médecines autochtones traditionnelles. Conformément aux recommandations du Comité permanent du Parlement sur la santéNote de bas de page 59, les professionnels de la santé (par exemple, les guérisseurs autochtones, les pharmaciens, les experts en médecine chinoise traditionnelle, etc.) qui mélangent des produits à la demande d'un patient ne sont pas visés par les règlements envisagés puisqu'ils sont exclus de la définition de « manufacturier » adoptée par la DPSN. La Direction s'affaire également à rédiger des lignes directrices quant aux normes relatives aux éléments probants sur la sécurité et l'efficacité des produits qui s'appliqueront davantage aux produits de santé naturels. Le niveau de données nécessaires variera selon l'allusion à la santé et d'autres facteurs mais tiendra compte des références traditionnelles et de l'historique d'usage, des opinions de comités et d'experts, ainsi que des études sur les échantillons aléatoires et contrôlés, au besoinNote de bas de page 60.

« Au début, nos femmes posaient des questions aux qalunaats (les blancs), pas à nous. Maintenant, elles se fient sur nos conseils. Notre estime de soi, à titre non seulement personnel mais aussi collectif, s'en trouve ainsi restauré. Nous faisons de nouveau confiance à notre peuple. Nous prenons bien soin de nos femmes et de leur famille, dans le respect de nos valeurs culturelles et dans le cadre du système de soins de santé provincial . . . »

Sages-femmes inuites

Les femmes autochtones et les collectivités saines

Bureau pour la santé des femmes, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Santé Canada*

Tantôt mères ou pourvoyeuses de soins, tantôt professionnelles de la santé ou chercheures dans ce domaine, les femmes autochtones jouent une myriade de rôles au sein de leurs collectivités. Quelque soit leur secteur d'engagement, elles exercent par leur participation et leur collaboration une influence certaine dans la prestation des soins de santé et l'élaboration de priorités dans le domaine de la recherche, des politiques et des programmes inhérents. Certes, l'évaluation des répercussions à long terme des initiatives déployées prendra plusieurs années. Mais il est clair que la contribution des femmes autochtones à la santé de leurs collectivités est de plus en plus considérée comme vitale.

Une diversité de rôles

Par l'entremise de leur travail visant la prestation et l'administration de soins de santé, la promotion de la santé et l'éducation dans ce domaine, les femmes autochtones jouent divers rôles essentiels au sein de leur collectivité. Elles occupent des postes d'infirmières, de guérisseuses traditionnelles, de sages-femmes, de nutritionnistes, de médecins, de conseillères et de praticiennes de médecine douce; ces rôles revêtent une importance particulière vu la pénurie importante de fournisseurs de soins de santé qui prévaut dans la plupart des collectivités autochtonesNote de bas de page 61. Par exemple, les femmes des Premières Nations et des Inuites comptent pour 95 pour cent du nombre total de représentants en santé communautaire (RSC) au Canada, évalué à 1 600Note de bas de page 62.

En outre, les femmes autochtones exercent une influence sur la santé de leur collectivité en raison du rôle social qu'elles y jouent à titre, par exemple, de mères et d'aînées communautaires, entre autres. Elles prennent soin des besoins alimentaires et vestimentaires de leurs enfants et d'autres membres de la collectivité - souvent avec des moyens limités - et doivent composer avec des taux élevés de blessures, de maladies chroniques et de toxicomanie qui touchent de nombreuses collectivités. Les femmes autochtones peuvent assumer ce rôle de protectrice pendant presque toute leur vie, puisque ces mères ont souvent commencé très jeunes à avoir des enfants, qu'elles en ont deux fois plus que les non Autochtones et qu'elles ont une meilleure espérance de vie que leurs compatriotes de l'autre sexeNote de bas de page 63, Note de bas de page 64.

Des femmes, des familles et des collectivités en santé

Même si les femmes autochtones jouent un rôle essentiel sur le plan de la santé de leur collectivité, et ce souvent en dépit de mauvaises conditions sociales et économiques, leur propre état de santé est moindre que celui des femmes de la population canadienne en généralNote de bas de page 65, Note de bas de page 66 (voir l'article de la page 6). De plus, au moins les trois quarts des femmes autochtones du Canada ont déjà été victimes de violence familiale, ce qui les a profondément marquées, ainsi que leurs enfants par ailleurs, sur les plans physique et affectifNote de bas de page 67, Note de bas de page 68.

En vue de régler ces problèmes, les femmes autochtones ont commencé à élaborer une approche holistique de santé. Elles estiment que leur santé propre est intimement liée à celle de leur famille et de leur collectivité; et que des familles fortes, des structures de soutien, des foyers et des collectivités sécures ainsi que le développement sain de l'enfant sont autant de facteurs qui contribuent à une meilleure santéNote de bas de page 69.

Catalyseurs de changement

Depuis les années 1970, des organismes comme l'Association des femmes autochtones du Canada, l'Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada, la Pauktuutit Inuit Women's Organization (Association des femmes inuites du Canada) et Femmes autochtones du Québec jouent un rôle important de catalyseurs du changement. Malgré des ressources limitées et leur exclusion fréquente, à tous les niveaux, du processus décisionnel, ces organismes ont dirigé ou entrepris des recherches sur les besoins des femmes et des enfants autochtones en matière de santé; ils ont aussi déterminé dans quelle mesure les politiques, les programmes et les services comportent des lacunes dans ce domaine et élaboré des stratégies et des modèles visant à les comblerNote de bas de page 70.

Ces stratégies sont fondées sur les connaissances traditionnelles et les pratiques de guérison selon lesquelles la bonne santé résulte d'un juste équilibre entre les composantes physique, affective, spirituelle et mentale d'une personne. Elles favorisent le respect de soi et des autres, l'harmonie entre les individus et leur milieu ainsi que la participation et la prise en mains par les collectivités de leurs champs de responsabilités propres. Ces stratégies reconnaissent de surcroît que les femmes et les hommes envisagent la guérison et le bien-être différemment sur le plan des besoins et des approchesNote de bas de page 71, Note de bas de page 72. Ces approches sont appliquées actuellement à une vaste gamme de questions liées à la santé, y compris celles touchant le traitement et la prévention du diabète, la santé de la mère et de son enfant, les toxicomanies, ainsi que le sida et le VIHNote de bas de page 73, Note de bas de page 74.

Pour atteindre leurs objectifs, les femmes autochtones ont ouvert le dialogue et trouvé de nouveaux moyens de collaborer avec de nombreux secteurs, dont le gouvernement, les associations professionnelles, les organismes de services, les chercheurs universitaires et diverses organisations non gouvernementales. Parmi ces partenariats, on compte ceux qui suivent :

Collaboration à propos de la formation et des pratiques exemplaires

  • L'Association des infirmières et infirmiers autochtones du Canada (AIIAC) a collaboré avec la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada et les représentants des Premières Nations pour palier la pénurie actuelle et future d'infirmières dans les collectivités des Premières Nations et des Inuits. Dans le cadre d'une étude financée par Santé Canada et effectuée en 2000, l'AIIAC a mené une enquête auprès des infirmières affectées à des collectivités éloignées des Premières Nations; on a pu ainsi obtenir des renseignements pouvant permettre de déterminer dans quelle mesure les liens que les infirmières entretiennent avec leur collectivité sont essentiels pour leur permettre de conserver leur emploiNote de bas de page 77. Ces recherches représentaient l'assise des initiatives déployées pour permettre l'élaboration de stratégies visant à accroître l'inscription d'étudiants autochtones à des programmes de sciences infirmières, par exemple; ces stratégies devaient aussi donner lieu à l'analyse des modèles de pratiques exemplaires utilisés par les collectivités des Premières Nations et des Inuits pour recruter des infirmières et les maintenir en poste.

Dans les collectivités éloignées et isolées des Premières Nations et des Inuits du Nord, les infirmières sont embauchées par la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, par Santé Canada ou par les représentants des Premières Nations. Celles-ci constituent le groupe le plus important de fournisseurs de soins de santé professionnels de ces collectivités. Les infirmières non autochtones représentent la majorité au sein de ces collectivités.

  • Les femmes autochtones médecins, infirmières ou sages-femmes, ou qui fournissent d'autres soins de santé jouent un rôle clé dans l'élaboration de lignes directrices s'appliquant aux pratiques des professionnels de la santé oeuvrant auprès des peuples autochtonesNote de bas de page 78. Les femmes autochtones travaillent également de concert avec des associations professionnelles et des gouvernements en vue d'offrir des services de maternité accrus, incluant la formation des sages-femmes. Cette initiative vise à mettre un terme à une vieille pratique voulant que les femmes des Premières Nations et les Inuites des collectivités éloignées aillent accoucher dans les grands centres urbainsNote de bas de page 79. Des recherches entreprises à l'échelle internationale et l'expérience communautaire acquise au Canada, comme à l'Inuulitsivik Maternity Centre par exemple, ont révélé que les initiatives sanitaires et sociales fondées sur la participation des femmes autochtones de la localité entraînent une plus grande participation aux programmes de santé, ce qui contribue à améliorer la santé des mères et des nouveau-nés et augmente la viabilité des services offertsNote de bas de page 81, Note de bas de page 84.

Collaboration aux recherches sur la santé des femmes autochtones

Les femmes autochtones participent de plus en plus à des projets conjoints de recherche communautaires ou universitaires, qui prennent largement en compte la sensibilité culturelle et la responsabilisation des collectivités autochtones. C'est d'ailleurs ce qui ressort d'une synthèse de plus de 30 initiatives de recherche déployées relativement à des questions et à des politiques touchant la santé des femmes autochtones, financées par le Bureau pour la santé des femmes de Santé Canada par l'entremise des Centres d'excellence pour la santé des femmesNote de bas de page 85. Cet examen a montré à quel point il importe d'effectuer de nouvelles recherches qui tiennent compte des différences entre les femmes des Premières Nations, les Métisses et les Inuites; en effet, c'est ainsi qu'on pourra établir des indicateurs précis de la santé des femmes autochtones et déterminer alors quelle importance il faudra accorder aux recherches, aux politiques et aux programmes sur la santé à l'avenir. En outre, l'examen a permis de constater que les recherches visent de plus en plus à documenter et à comprendre les comportements axés sur la santé, qui varient très souvent en fonction du sexe d'une personneNote de bas de page 86.

Pour des collectivités en meilleure santé

Comme bon nombre de ces initiatives conjointes sont relativement récentes, nous ne pouvons pas encore évaluer leurs répercussions à long terme sur la santé. Néanmoins, les femmes autochtones aident à renforcer les capacités des collectivités à se maintenir en bonne santé. À titre de clientes, de membres des conseils communautaires, de bénévoles et de fournisseurs de soins de santé, elles s'assurent que les établissements de soins de santé sont adaptés à leur culture; en outre, elles formulent et appliquent des politiques, des programmes et d'autres services en matière de santé qui répondent bien aux besoins locaux. Ces femmes acquièrent de nouvelles compétences en leadership, en développement communautaire et en recherche. Certaines femmes autochtones ont désigné l'attitude positive, le pragmatisme et la résilience comme les principaux points forts des initiatives de santé communautaire. D'autres femmes reconnaissent la portée et l'importance des contributions féminines à la santé de leur collectivité. On ne pourra améliorer la santé de tous les Autochtones sans reconnaître ou soutenir largement l'apport des femmes autochtones dans ce domaine.

*Sari Tudiver a coordonné la rédaction du présent article, en collaboration avec Virginia Adamson et Cathy Winters du Bureau pour la santé des femmes, Direction générale de la politique de la santé et des communications, Santé Canada. Un merci particulier à Madeleine Dion Stout, chercheure et experte-conseil, pour sa gracieuse participation et ses avis éclairés qui ont facilité l'élaboration de l'article. Il importe également de remercier les personnes suivantes pour leur expertise et pour la précieuse information qu'elles ont accepté de transmettre : Kerry Bebee et Carole Couchie, Sages-femmes autochtones du Canada; Judi Jacobs, National Indian and Inuit Community Health Representatives Organization; Monica Stokl, gestionnaire de programme, Sheway; Nancy Poole; Dawn Smith; Marsha Forrest et Kathleen MacMillan, Sharon Stanton et Ray Amiro, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada.

Sheway - Sensibilisation des femmes enceintes et des mères à risque élevé

Sheway est un organisme qui fournit aux femmes et à leur famille des soins médicaux et des services infirmiers prénatals et postnatals, un soutien nutritionnel, du counselling sur la toxicomanie, un processus d'intervention d'urgence ainsi que des services juridiques inhérents à la garde des enfants et à d'autres questions (voir la figure 1), et ce, dans une optique qui respecte la culture, l'histoire et les traditions autochtones. Situé dans l'est du centre-ville de Vancouver, un des secteurs les plus pauvres du Canada où le taux de criminalité est élevé et l'industrie de la drogue et du sexe très active, cet organisme est administré par un conseil composé de représentants d'organismes autochtones et autres et de divers ordres de gouvernement.

Grâce au financement du Bureau pour la santé des femmes de Santé Canada, le Centre d'excellence pour la santé des femmes de la Colombie-Britannique a évalué les résultats obtenus par Sheway sur une période de trois ansNote de bas de page 75. Au nombre des conclusions tirées, mentionnons les suivantes :

  • au total, 30 pour cent des femmes n'étaient pas suivies sur les plans médical ou prénatal au moment de leur adhésion au programme; au moment de leur accouchement, 91 pour cent d'entre elles étaient suivies par un médecin ou une sage-femme;
  • au moment d'adhérer au programme, 79 pour cent des femmes s'inquiétaient de leur nutritionNote de bas de page 76; seulement 4 pour cent d'entre elles s'en souciaient toujours six mois après avoir accouché; et
  • la plupart (86 pour cent) des femmes qui ont accouché après avoir utilisé les services de Sheway ont eu un bébé qui pesait plus de 2 500 grammes, ce poids étant comparable à celui de bébés des autres régions de la ville où le taux de pauvreté est moins élevé.

Il est encore trop tôt pour déterminer dans quelle mesure ce projet permettra de réduire à long terme la toxicomanie chez les femmes. Toutefois, Sheway a réussi à fournir des soins spécialisés tout en appliquant une philosophie de services qui tient compte de la culture des femmes, est adaptée à leurs besoins et leur permet de s'épanouir.

Figure 1 : Sheway - Approches et services

Figure 1 : Sheway - Approches et services

Le diagramme de la figure 1 illustre des services de santé et de soutien offerts par l'organisme Sheway pour répondre aux besoins des femmes autochtones et de leurs enfants, en prenant en considération leurs conditions de vie et leur capacité d'influer sur ces conditions. Les services et le soutien sont illustrés par neuf points dans un cercle - à partir d'en haut, dans le sens d'une horloge : Soutien pour l'établissement de réseaux - aussi bien d'amitié que de de soutien continu Bébés en santé, développement des nourrissons / enfants Aide et soutien en matière d'accès, de garde et d'autres questions juridiques Aide et soutien pour des questions touchant le logement et les compétences parentales Soutien en vue de réduire l'exposition à la violence et d'établir des relations de soutien Soutien concernant le VIH, l'hépatite C et les MTS Soutien / counseling sur des questions liées à l'utilisation adéquate et inadéquate des médicaments Soutien et services sur le plan nutritionnel Soins prénataux et post-nataux et services infirmiers L'approche de Sheway est représentée au centre du cercle, et comprend les haltes-accueil et les programme communautaires, l'intervention d'urgence, l'aide et le soutien, l'établissement de liens avec d'autres services et la réduction des obstacles aux soins.


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Information utilisée avec la permission de Sheway, Vancouver (Colombie-Britannique), 2000.

Qui fait quoi?

Qui fait quoi? est une chronique régulière du Bulletin de recherche sur les politiques de santé, qui porte sur les principaux intervenants engagés dans la mise en oeuvre de recherches stratégiques liées au secteur étudié. Dans le présent numéro, on décrit quelques initiatives déployées par une panoplie d'organisations et de gouvernements en vue d'améliorer l'état de santé des Autochtones.

Tiffany Thornton, Direction de la recherche et de l'analyse appliquée, Direction générale de l'information, de l'analyse et de la connectivité, Santé Canada, auparavant avec la Direction des politiques, de la planification et de l'analyse stratégiques, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada

Fondation autochtone de guérison (FAG)

La FAG finance des recherches stratégiques visant à permettre l'élaboration, la mise en oeuvre ou l'évaluation de projets communautaires portant sur les services de guérison. Rédigé en 2001, le premier rapport provisoire d'évaluation de la Fondation repose sur l'analyse de 344 projets financés en 1999, ainsi que sur l'examen approfondi d'un échantillon de 36 dossiers de projet. Les conclusions tirées montrent que 59 224 personnes ont participé à des activités de guérison et que 1 686 collectivités ont bénéficié de projets financés par cette fondation. Les résultats présentés dans le deuxième rapport provisoire, qui a été rédigé en 2002, révèlent que ces projets donnent d'assez bons résultats. Toutefois, nous devons encore élaborer des services familiaux supplémentaires et de nouvelles stratégies de guérison à l'intention des hommes et des jeunes. On publiera en 2005 un rapport final d'évaluation des répercussions de ce projet (voir le site suivant : Fondation autochtone de guérison).

L'avenir des enfants et des jeunes de l'Arctique (AEJA)

Déployée par le Conseil de l'Arctique, cette initiative vise à permettre une meilleure compréhension du développement durable, à améliorer la santé et le bien-être des enfants et des jeunes de l'Arctique, ainsi qu'à favoriser l'établissement d'un bon processus décisionnel. Les activités actuelles portent sur trois composantes de cette initiative - la santé, les stages et l'établissement de réseaux - et comportent la collecte et l'analyse de données relatives à 16 indicateurs clés de huit pays circompolaires; parmi les autres activités effectuées, mentionnons l'identification de modèles de pratiques exemplaires dans les domaines de la santé de la mère et de son nouveau-né, de la santé psychosociale et du suicide, des maladies respiratoires et d'autres maladies transmissibles, ainsi que de l'alcoolisme et de la toxicomanie (voir le site suivant : http://www.arctic-council.org ou communiquer par courriel avec judith.stanway@hc-sc.gc.ca).

Dialogue parrainé par l'ISPC

La santé des peuples autochtones est une priorité en vertu de l'Initiative sur la santé de la population canadienne (ISPC). De novembre 2002 à 2003, l'organisation réunira les dirigeants touchés par les questions relatives à la santé de la population des Premières Nations, des Métis et des Inuits, au cours d'une série de séances de remue-méninges visant à explorer les déterminants sociaux de la santé, notamment à l'échelle communautaire, ainsi qu'à cerner les approches stratégiques pouvant permettre de réduire les écarts sur le plan de la santé. L'objectif de cette initiative est d'encourager le dialogue et de promouvoir une approche interactive visant à déterminer dans quels domaines il faudra effectuer à l'avenir des recherches et formuler des politiques (voir le site suivant : L'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS)).

La télésanté pour les membres des Premières Nations et les Inuits

La télésanté consiste à faire usage des données et des technologies de communication pour améliorer l'accès aux soins de santé, assurer le soutien, l'efficience et l'efficacité en la matière ainsi que favoriser l'éducation et la diffusion de renseignements inhérents. Ce service permet aux collectivités des Premières Nations et des Inuits d'obtenir plus facilement des conseils d'experts dans le domaine médical, de nouer des liens avec des professionnels de la santé et d'échanger davantage de renseignements sur la santé. Les résultats d'un projet national de recherche sur la télésanté à l'intention des Premières Nations récemment terminé (2001), serviront à cerner les facteurs susceptibles de garantir le succès des initiatives qui seront déployées à l'avenir dans les collectivités des Premières Nations et des Inuits (voir le site suivant : http://www.hc-sc.gc.ca/dgspni/sPSP/telesante
/publications/rapport_final.htm).

Développement de la petite enfance chez les Inuits

En 2001, l'Inuit Tapiriit Kanatami (ITK) a entrepris de participer à un groupe de travail sur l'IECD, le développement de la petite enfance chez les Inuits, qui était chargé d'évaluer les programmes et enjeux touchant ce domaine. Fruit de ces efforts, le rapport intitulé Inuit Early Childhood Development Issues: A Discussion Paper utilise les données recueillies auprès d'enseignants, de parents et de travailleurs sociaux et communautaires de six régions inuites du Nord pour déterminer les avantages des programmes de l'IECD, par exemple, les services de garde de jour et le programme d'aide préscolaire aux Autochtones; ces renseignements ont également permis de souligner l'importance des questions relatives au développement des jeunes inuits (accessibles sur le site suivant : Inuit Tapiriit Kanatami (ITK)).

Planification des services infirmiers

En 2002, le Bureau des services infirmiers (BSI) de Santé Canada a commandé une enquête nationale qui visait toutes les infirmières autorisées de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada. Les résultats de cette enquête aideront le BSI à répondre aux besoins en ressources humaines dans ce secteur au Canada pour les cinq prochaines années, notamment en ce qui concerne : les données de base nationales et régionales sur la main-d'oeuvre infirmière actuelle, y compris des renseignements sur les populations, l'emploi et l'éducation; les changements de personnel prévus pour les cinq prochaines années; et la mesure dans laquelle les employées sont satisfaites de leur milieu de travail et arrivent à bien concilier travail et vie personnelle. Pour obtenir de plus amples renseignements à ce sujet, veuillez consulter le site suivant : http://www.hc-sc.gc.ca/fnihb-dgspni/ dgspni/bsi.htm ou communiquer par courriel avec Sharon.Stanton@hc-sc.gc.ca

Études d'AINC sur les tendances démographiques et les tendances des services

Affaires indiennes et du Nord Canada (AINC) achève actuellement une étude, intitulée « Conséquences possibles de l'évolution démographique des Premières Nations », qui vise à établir des projections démographiques et les tendances d'utilisation en ce qui a trait aux services offerts par les programmes et aux coûts qui s'y rattachent. Cette étude présentera également des modèles de dépenses liées aux soins dentaires, aux services de santé non assurés, à l'éducation, au logement, à l'emploi et aux services correctionnels (voir le site suivant : http://www.ainc-inac-gc.ca/pr/ra/index-fra.php ou communiquer par courriel avec beavond@inac.gc.ca).

Recherches sur la santé sexuelle et génésique

Depuis 1998, le projet de Santé Canada qui traite de la surveillance accrue des jeunes de la rue au Canada nous a permis de recueillir des données sur l'incidence et les comportements à risque de ces jeunes dans diverses villes canadiennes (environ 30 pour cent de ceux-ci se sont déclarés Autochtones en 1999). Le Ministère recueille également des données sur la prévalence des maladies transmissibles sexuellement (MTS) dans un certain nombre de collectivités autochtones. Les autres données tirées de ces projets serviront à la planification et à l'exécution de nouveaux programmes, ainsi qu'à justifier l'utilisation de ressources et à favoriser l'amélioration et le soutien d'initiatives communautaires sur la santé sexuelle et génésique. Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec Susanne Shields (Surveillance accrue) au (613) 946-8637 et Maureen Perrin (Surveillance des MTS) au (613) 946-4827.

Projet de cohésion sociale

Les chercheurs de l'Université de Western Ontario ont récemment entrepris de collaborer avec Affaires indiennes et du Nord Canada à un projet quinquennal portant sur la cohésion sociale des collectivités des Premières Nations. Financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, ce projet portera sur le capital social, la cohésion sociale et la situation démographique des collectivités des Premières Nations. On pourra aussi établir de la sorte une très bonne base de données de recherche sur ces collectivités et former une nouvelle génération de chercheurs parmi les membres des Premières Nations et des non-Autochtones (voir le site suivant : Working Papers).

Des statistiques sur la santé des Premières Nations

La Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada publiera sous peu un Profil statistique de la santé des Premières Nations au Canada. Ce rapport trace un tableau général de l'état et des conditions de santé ayant une incidence sur la qualité de la santé des Premières Nations dans les réserves canadiennes. Les données portant sur l'immunisation, la santé périnatale, la mortalité et les maladies transmissibles ont été recueillies en 1999, puis comparées à des statistiques homologues portant sur l'ensemble de la population canadienne. Le document présente également quelques statistiques sur le logement et l'eau en rapport avec la santé. Ce profil est le premier d'une série de documents périodiques qui constitueront une base de savoir axée sur l'amélioration de la santé et qui serviront à enrichir les connaissances des professionnels de la santé, des chercheurs, des leaders communautaires et des décideurs. (Le rapport sera affiché électroniquement au site suivant : http://www.hc-sc.gc.ca/fnihb/sppa/hia/ ou communiquer par courriel avec fnihb.stats@hc-sc.gc.ca).

Organisation nationale de la santé des Autochtones (ONSA)

L'Organisation nationale de la santé des Autochtones (ONSA) a mené des recherches sur les systèmes de santé autochtones qui existent dans les collectivités des Premières Nations et des Inuits, les centres urbains et les peuplements métis. Ces systèmes se composent de l'ensemble des services, des fonctions et des ressources qui visent essentiellement à influer sur la santé des Autochtones. Le rapport intitulé Aboriginal Health Systems Report fait état des recherches effectuées en vue de cerner les initiatives qui ont permis comme prévu de surmonter les obstacles entre autres sectoriels et culturels liés aux systèmes de santé autochtones. Ce rapport présente des recommandations visant à permettre aux collectivités autochtones d'établir des systèmes de santé communautaires efficaces qui, selon une vision holistique, vont de pair avec le système de santé général. Pour obtenir de plus amples renseignements sur l'ONSA, veuillez consulter le site suivant : L'Organisation nationale de la santé autochtone ou communiquer par courriel avec mmartin@naho.ca

Groupe consultatif sur la prévention du suicide

Le rapport Agir selon ce que nous savons : La prévention du suicide chez les jeunes des Premières Nations résulte d'une analyse menée par un groupe indépendant nommé par le ministre fédéral de la Santé et le chef national de l'Assemblée des Premières Nations en 2001. Le Groupe consultatif sur la prévention du suicide a examiné la documentation actuelle et formulé 30 recommandations pour aider à réduire le taux de suicide chez les jeunes des collectivités des Premières Nations à l'échelle du pays. Ces recommandations ont été regroupées en quatre catégories :

  1. mieux comprendre les approches jugées efficaces pour aider à prévenir le suicide;
  2. mettre au point des services de soins de santé plus efficaces et mieux intégrés aux paliers national, régional et local;
  3. appuyer les démarches engagées à l'échelle communautaire;
  4. concevoir des stratégies axées sur l'identité, la tolérance et la culture des jeunes.

Les intéressés peuvent obtenir des exemplaires du rapport en consultant le site suivant :
Savoir et agir : la prévention du suicide chez les jeunes des Premières nations

Programme national sur les contaminants de l'environnement chez les Premières Nations (PNCEPN)

Élaboré conjointement par l'Assemblée des Premières Nations et Santé Canada en 1999, ce programme vise à encourager les membres des Premières Nations à concevoir des projets de recherche communautaires. Ces recherches portent sur trois domaines : l'exposition, l'évaluation et la gestion des diagnostics et des risques. L'analyse du risque que les nouveaux contaminants de l'environnement pose, chez les Premières Nations, pour les structures sociales et les pratiques culturelles présente un intérêt particulier (voir le site suivant : L'Assemblée des Premières Nations).

Recrutement de chercheurs autochtones

Initiative maîtresse de l'Institut de la santé des Autochtones (ISA), le programme Cadre de développement de la capacité autochtone de recherche en santé (CDCARS) sert à recruter des étudiants en recherche dans le domaine de la santé autochtone, ainsi qu'à aider les peuples et les chercheurs autochtones à travailler de concert pour garantir la santé de leur peuple. Fondés en 2001, les quatre centres de ce programme mettent l'accent sur une gamme de questions liées à la santé, par exemple : la santé de la population; les services de santé; la santé et le développement de l'enfant; les questions déontologiques; les maladies chroniques et le diabète; les toxicomanies et la santé mentale; la nutrition; les maladies cardio-respiratoires; et la santé prénatale. L'ISA est membre des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) (voir le site suivant : Instituts de recherche en santé du Canada).

L'utilisation des données relatives à la santé au Canada

L'utilisation des données relatives à la santé au Canada est une chronique régulière du Bulletin de recherche sur les politiques de santé, dans laquelle on décrit les méthodes utilisées pour analyser et colliger les données sur la santé. Dans le présent numéro, nous examinons la technique qui consiste à regrouper des dossiers.

Le couplage des dossiers

Adam Probert, Direction des politiques, de la planification et de l'analyse stratégiques, Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits, Santé Canada

Les provinces et territoires possèdent un certain nombre de bases de données administratives sur les naissances, les décès et les hospitalisations. Utilisées en général pour la surveillance des maladies, l'évaluation des risques ainsi que la planification des services de santé et l'établissement des priorités, ces données peuvent également être couplées avec celles d'enquêtes sur la santé de la population, les chercheurs pouvant ainsi en évaluer l'état de santé d'un point de vue longitudinal. Ce couplage des dossiers est particulièrement utile dans le cas des membres des Premières Nations qui vivent dans les réserves, car il est souvent difficile d'obtenir des renseignements précis sur leur santé.

Problèmes d'accès à l'information sur la santé des membres des Premières Nations

Pour diverses raisons, il est plus difficile d'obtenir des renseignements sur la santé des membres des Premières Nations que sur celle des autres Canadiens :

  • La plupart des dossiers de santé n'identifient pas les patients selon leur origine ethnique; les données globales peuvent comprendre des renseignements sur les membres des Premières Nations, mais il peut être difficile de les séparer.
  • Les services et les données qui concernent la santé des peuples des Premières Nations sont répartis entre le gouvernement fédéral (Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits (DGSPNI), Santé Canada), les gouvernements provinciaux et territoriaux, et les collectivités auxquelles le gouvernement fédéral a transféré la responsabilité des programmes et services de santé.
  • Chaque administration a recours à différentes méthodes pour identifier les membres des Premières Nations, même lorsque l'identification est possible. Par conséquent, on peut difficilement établir des comparaisons entre les provinces et les territoires.
  • Même dans les bases de données où l'origine ethnique des patients est précisée, ceux-ci ne fournissent pas toujours de l'information à ce sujet. Par exemple, seulement 84 pour cent des rapports des cas de sida et 25 pour cent des dossiers d'examen du VIH précisent l'origine ethnique des patientsNote de bas de page 87.

Comment fonctionne le couplage des dossiers?

Grâce au couplage des dossiers, les chercheurs peuvent surmonter ces problèmes. Ce processus permet de combiner deux ou plusieurs dossiers tirés d'une diversité de bases de données ou de fichiers pour produire un nouveau dossier. Pour y arriver, on s'efforce d'effectuer la concordance entre certains renseignements personnels comme le nom, la date de naissance et/ou le numéro d'assurance sociale. Ce processus consiste à comparer par ordinateur des fichiers qui contiennent de l'information au sujet de milliers, voire de millions de gens. On obtient ainsi une liste de « concordances exactes », où les variables sont toutes identiques, et de « concordances probables », où la correspondance est moins certaine.

Dans l'exemple présenté plus loin (voir la figure 1), le fichier A représente le Registre des Indiens, dans lequel Affaires indiennes et du Nord Canada tient à jour la liste des Indiens inscrits qui jouissent de certains avantages. Le fichier B représente la base de données canadienne sur la mortalité, répertoire de tous les décès survenus au Canada depuis 1950. Ces deux fichiers contiennent plus de variables que celles présentées ici. Toutefois, seules quelques variables communes aux deux, par exemple le nom, la date de naissance (DDN) et le sexe, sont requises pour coupler les dossiers.

Dans la figure 1, on a utilisé des noms et des renseignements personnels fictifs pour illustrer le fonctionnement du couplage des dossiers. Par exemple, la concordance la plus probable pour « Raymond Whiteduck » du fichier A est « R. Whiteduck » du fichier B. Il existe d'autres concordances possibles, mais la date de naissance ou la façon d'épeler le nom est différente. Même si on peut utiliser d'autres moyens pour tenir compte de ces différences, « Raymond White Duck » du fichier B est environ 50 ans plus jeune que « Raymond Whiteduck » du fichier A; par conséquent, il n'y a probablement pas de concordance.

Il n'existe aucune concordance dans le fichier B pour le deuxième exemple, « John Fox ». Même si on a trouvé un homme ayant la même DDN, son nom est tout à fait différent. Dans le troisième exemple, « William Bearhead » est probablement le même que « Bill Bearhead », « Bill » étant un surnom de William. Le manque de concordance dans la DDN pourrait s'expliquer par une erreur de transcription, les champs du mois et du jour ayant été inversés dans l'une ou l'autre des bases de données.

Figure 1 : Exemple simplifié du couplage des dossiers Fichier A: Registre des Indiens
Nom* DDN* Sexe*
Raymond Whiteduck 09/15/42 M
John Fox 05/28/68 M
Bill Bearhead 02/06/54 M
Remarque : Tous les noms et renseignements personnels sont fictifs.
Figure 2 : Exemple simplifié du couplage des dossiers Fichier A: Registre des Indiens Fichier B: Base de données canadienne sur la mortalité
Nom* DDN* Sexe*
R. Whiteduck 09/15/42 M
Ray Whiteduck 12/03/71 M
Raymond White Duck 03/14/92 M
     
Bob Okimaw 05/28/68 M
Jennifer Fox 11/11/24 F
     
Peter Bearhead 10/05/62 M
William Bearhead 06/02/54 M
* Remarque : Tous les noms et renseignements personnels sont fictifs.

Le couplage des dossiers en pratique

Au Manitoba, un comité multisectoriel a récemment mené une étude fondée sur le couplage des dossiers, afin d'examiner les données sur l'état de santé et l'utilisation de services liés aux soins préventifs, à l'hospitalisation et aux consultations médicalesNote de bas de page 88. Ce projet a permis de relier le Système de vérification de statut (fichier généré par la DGSPNI à partir du Registre des Indiens) aux fichiers, entre autres, de morbidité, de mortalité et d'actes chirurgicaux du Manitoba Hospital. Grâce au couplage des dossiers, les chercheurs ont pu obtenir le même genre de données sur l'état de santé et l'utilisation des soins de santé pour les membres des Premières Nations que pour les autres résidents de la province. Les chercheurs et les décideurs espèrent que de plus en plus de renseignements de ce genre seront accessibles et que ce modèle de couplage des dossiers servira dans d'autres provinces, voire à l'échelle nationale. Il n'existe actuellement aucune liste détaillée des populations métis ou inuites. Toutefois, dès qu'elle sera dressée, nous pourrons procéder de la même façon pour coupler leur dossier médical.

Quelles sont les préoccupations?

Comme il faut obtenir des informations détaillées pour coupler des dossiers, on doit se préoccuper de la protection de la vie privée et du caractère confidentiel des renseignements personnels. Il faut aussi se pencher sur l'accès et la propriété des données, ainsi que le contrôle et la possession des données; on doit en outre obtenir le consentement requis pour coupler des dossiers et préserver la sécurité des données couplées. Le couplage effectué au Manitoba s'est bien déroulé, en partie parce que les membres de l'Assemblée des chefs du Manitoba faisaient partie de l'équipe qui a procédé à cette enquête. Les répondants de l'Enquête nationale sur la santé de la population et de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes pouvaient préciser s'ils acceptent ou non que leurs dossiers soient éventuellement regroupés par Statistique Canada. Fait intéressant : ils étaient très souvent d'accord.

On se demande aussi s'il convient d'utiliser des données à d'autres fins que celles qui nous ont amenés à les recueillir. Par exemple, les chercheurs pourraient vouloir coupler des dossiers fiscaux à une base de données sur les congés d'hôpitaux pour déterminer si la situation socio-économique est un déterminant de l'état de santé. Dans de telles circonstances, on doit tenir compte non seulement des préoccupations liées au couplage des dossiers, mais aussi aux avantages que le public pourra retirer des nouvelles connaissances acquises de cette façon.

Au Canada, la plupart des couplages de dossiers provenant de bases de données nationales sont effectués par Statistique Canada. Toutes les propositions présentées à ce sujet (dans lesquelles on doit présenter, entre autres, des renseignements détaillés sur les bases de données qui seront couplées, le genre de renseignement qu'on cherche à obtenir et les organisations qui soutiennent le projet) sont approuvées par un comité d'examen chargé de les passer en revue. Si celui-ci considère que les résultats du couplage pourraient nuire à une personne ou à un groupe, la proposition est rejetéeNote de bas de page 89.

Couplage de données et données longitudinales

Les répercussions sur la santé à la suite d'expositions ou d'interventions peuvent prendre des années à se manifester. Il faut souvent recueillir des données au sujet d'une personne sur une longue période - c'est ce qu'on appelle des données longitudinales. Le couplage des dossiers est l'un des moyens les plus pratiques pour obtenir des renseignements longitudinaux et croisés sur la santé. Cette méthode est particulièrement utile lorsque les dossiers sont conservés à divers endroits, comme dans le cas des Premières Nations.

Le saviez-vous?

Le saviez-vous? est une chronique régulière du Bulletin de recherche sur les politiques de santé, dans laquelle on décrit divers aspects des recherches et données sur la santé susceptibles d'engendrer des idées fausses. Dans le présent numéro, nous examinons les diverses manières par lesquelles le biais peut influer sur les résultats de recherche

Comment et pourquoi doit-on déterminer l'existence d'un biais en recherche?

Bernard Choi, PhD, Centre de prévention et de contrôle des maladies chroniques, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique, Santé Canada; professeur agrégé, Sciences de la santé publique, Université de Toronto, professeur associé, Épidémiologie et médecine communautaire, Université d'Ottawa

En épidémiologie, on définit le biais comme une déviation des résultats par rapport à la réalitéNote de bas de page 90. Par exemple, si 30 personnes assistent à une réunion mais que vous en comptez seulement 20, vous devez sans aucun doute vous tromper dans votre compte. Votre biais (déviation) se calcule comme suit : 20 - 30 = -10. En pratique, le biais en recherches sur les politiques en matière de santé peut compromettre la validité des données probantes utilisées pour l'élaboration des politiques.

L'erreur aléatoire et l'erreur systématique

L'erreur aléatoire (ou « le bruit ») n'est pas considérée comme un biais. Dans l'exemple ci-dessus, si vous comptez 20 personnes la première fois, 40 la deuxième, 35 la troisième, et 25 la quatrième, il s'agit d'erreurs aléatoires. Si vous faites la moyenne des quatre résultats, vous obtenez 30 participants, ce qui est exact. Par contre, le biais est une erreur systématique. Si vous sous-estimez ou surestimez constamment le nombre (p. ex., si vous comptez 20, 19, 21 ou 20 participants), vos résultats sont biaisés. On accroît la taille de l'échantillon pour réduire les erreurs aléatoires, mais cela ne change rien au biais. Par conséquent, même si vous comptez cent fois, vous obtiendrez toujours une estimation biaisée si vous faites des erreurs systématiques. Il existe de nombreuses sources de biais possibles, par exemple le biais de sélection, le biais d'information et le biais confusionnelNote de bas de page 91. Chacun est décrit brièvement ci-dessous.

Biais de sélection

Le biais de sélection se présente pendant l'étape d'élaboration d'une étude, par exemple, lorsque des sujets qui devraient faire partie de l'étude n'y sont pas inclusNote de bas de page 91. Dans l'exemple ci-dessus, il est possible qu'on compte constamment moins de participants parce que 10 d'entre eux sont assis dans un coin caché de la salle.

Le biais de Berkson, ou biais des admissions à l'hôpital, touche les études épidémiologiques où les sujets sont tous des patients hospitalisés. Par exemple, on ne pourrait pas appliquer les résultats obtenus auprès de patients hospitalisés diabétiques à toutes les personnes atteintes du diabète, car les patients hospitalisés sont probablement davantage atteints que les diabétiques qui n'ont pas été hospitalisés. Le biais de Neyman, ou biais de survie sélectif, provient du fait qu'on exclut les personnes décédées avant le début de l'étude, parce que l'exposition à la maladie étudiée accroît le risque de décès. Si on utilise différentes stratégies pour envoyer un questionnaire, on peut engendrer un biais dans le taux de réponse. Par exemple, on a constaté que si on appose de gros timbres commémoratifs sur les enveloppes de retour au lieu des affranchissements d'affaire conventionnels, le taux de réponse des infirmières est plus élevé Note de bas de page 92. L'état de santé lui-même peut provoquer un biais de sélection, comme dans l'effet du travailleur en bonne santé Note de bas de page 93. Comme les travailleurs sont en meilleure santé que la population en général (qui comprend aussi les malades, les personnes handicapées et les aînés), ils présentent souvent des taux de maladie et de mortalité plus faibles. Lorsque la santé d'un groupe professionnel est comparée à celle de la population en général, ce biais empêche les chercheurs de bien détecter les petits risques pour la santé liés au travail.

Le biais du bilan diagnostique se produit lorsqu'un fournisseur de soins de santé recommande un examen diagnostique poussé pour les patients qui ont obtenu des résultats positifs à un examen diagnostique ou de dépistage, alors que ceux dont les résultats sont négatifs n'ont pas à suivre la même procédureNote de bas de page 96. Par conséquent, les malades qui obtiennent des résultats négatifs à l'examen de dépistage ont automatiquement moins de chances d'être identifiés que ceux dont les résultats sont positifs, par exemple, par un système de surveillance qui utilise le dépistage de masse pour repérer des nouveaux cas de maladie. L'information recueillie au moyen du système de surveillance serait alors biaisée.

Le biais lié au sexe d'une personne peut avoir des conséquences aussi bien sur les recherches cliniques que sur l'élaboration de programmes et de politiques publiques. La surgénéralisation, qui entre dans cette catégorie de biais, peut se produire lorsque la perspective de l'un des sexes est appliquée aux deuxNote de bas de page 97. Par exemple, on a toujours eu tendance à effectuer les essais cliniques pour de nouveaux médicaments sur des hommes, afin d'éviter aux femmes toute exposition pouvant nuire à leur système reproducteur. Toutefois, ce genre de biais de sélection a fini tout de même par poser un risque pour les femmes, les conclusions étant appliquées à leur cas parfois de façon tout à fait inappropriéeNote de bas de page 98.

Biais d'information

Ce genre de biais se présente pendant l'étape de collecte des données, par exemple, lorsque les résultats sont déformés par des erreurs de mesure ou un mauvais classement du sujet, en fonction d'une variable d'exposition (p. ex., fumeur ou non-fumeur) ou d'une variable de résultats (p. ex., la présence ou l'absence de cancer)Note de bas de page 91.

Le biais de l'interviewer est causé par la collecte inconsciente ou même consciente de données sélectives par l'interviewer. Par exemple, celui-ci pourrait poser plusieurs fois des questions sur l'exposition aux personnes spécialement visées par l'étude (les sujets atteints de la maladie visée par l'étude), mais une seule fois aux sujets du groupe-témoin. Le biais touchant les questionnaires concerne des questions et des problèmes de formulation qui peuvent influencer les réponses des sujets. Le biais culturel peut, par exemple, modifier les résultats des tests du quotient intellectuel en empêchant systématiquement les enfants de familles immigrantes ou à faible revenu de bien le réussir. Le biais lié à la mémoire est causé par le fait que les répondants à une entrevue ou à un questionnaire se rappellent mal certains événements. Les questionnaires portant sur la nutrition sont souvent touchés par ce biais, parce que les gens peuvent éprouver des difficultés à se rappeler ce qu'ils ont mangé quelques jours, semaines ou mois plus tôt. Le biais lié à l'attrait social survient lorsque les répondants qui se sont auto-déclarés sur des sujets comme l'usage de la cigarette, l'exercice, le poids ou le revenu donnent des réponses qu'ils considèrent socialement attrayantes plutôt que révélatrices de leurs activités, de leur comportement ou de leur exposition.

Biais confusionnel

Ce genre de biais se produit lorsque les techniques de contrôle des facteurs confusionnels (c.-à-d. les facteurs liés aussi bien à l'exposition qu'aux résultats qui nous intéressent) ne sont pas utilisées au cours de l'étape d'analyse des données. Par exemple, dans une étude visant à déterminer s'il existe un lien entre la consommation d'alcool et les maladies respiratoires, le tabagisme doit être considéré comme pouvant être un facteur confusionnel, la cigarette et l'alcool allant souvent de pair, et la cigarette étant bien connue pour ses effets néfastes sur les poumons. Une association factice, ou artéfactuelle, entre l'exposition qui nous intéresse (l'alcool) et le résultat qui nous intéresse (une maladie respiratoire) peut se produire si le chercheur ne procède à aucun contrôle par rapport au tabagisme.

La stratification, par exemple, au moyen de taux normalisés en fonction de l'âge (voir la page 10), est utilisée depuis longtemps pour maîtriser les facteurs confusionnelsNote de bas de page 99. Dans notre exemple, on peut éprouver des difficultés à compter les participants à deux réunions qui se tiennent en même temps dans une même salle. L'une des réunions représente l'exposition qui nous intéresse, et l'autre, le facteur confusionnel. Pour effectuer la stratification, vous n'auriez qu'à demander aux participants de l'une des réunions de se regrouper à un bout de la salle, et au reste du groupe, de se placer à l'autre bout. Le rajustement de covariance, par exemple, la régression logistique multiple, est une méthode plus moderne fondée sur les modèles mathématiques pour maîtriser les facteurs confusionnelsNote de bas de page 100. Prenons encore une fois notre exemple : dans ce cas, vous n'auriez pas à regrouper physiquement les participants; vous pourriez simplement leur demander de porter un chapeau de couleur différente selon leur appartenance à l'un des deux groupes, par exemple, noir pour l'un et blanc pour l'autre. Toutefois, le rajustement de covariance est complexe; par conséquent, on doit bien formuler les variables des modèles et interpréter correctement les résultats. L'établissement d'un modèle est un processus complexe qui peut produire lui-même d'autres biaisNote de bas de page 101.

Conclusion

Tous doivent être bien conscients des biais possibles : non seulement ceux qui conçoivent, entreprennent et analysent les recherches, mais aussi ceux qui lisent les rapports de recherche et prennent des décisions en ce qui concerne entre autres la formulation de politiques en fonction de ces résultats.

Nouvelles notables

Nouvelles notables est une chronique régulière du Bulletin de recherche sur les politiques de santé, dans laquelle on décrit les « plus récentes » recherches stratégiques effectuées dans le domaine de la santé.

Comparaisons à l'échelle internationale des politiques relatives aux maladies chroniques

Le Centre de prévention et de contrôle des maladies chroniques est un centre de collaboration sur les politiques relatives aux maladies non transmissibles de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS). Ce centre a préparé une analyse comparative des politiques relatives aux maladies chroniques, qui ont été formulées et appliquées dans 30 pays participant au « Programme national intégré de prévention des maladies non transmissibles » de l'OMS. Pour obtenir de plus amples renseignements à ce sujet ou des exemplaires du rapport, veuillez communiquer par courriel avec Deborah.Baldwin@hc-sc.gc.ca

Surveillance du dépistage du cancer du col utérin

Le document intitulé Dépistage du cancer du col utérin au Canada : Rapport de surveillance 1998 fournit des renseignements de base émanant des ministères provinciaux de la Santé, et des programmes établis de dépistage du cancer. Parmi les résultats clés de cette étude, mentionnons les suivants :

  • La plupart des femmes atteintes du cancer du col utérin n'avaient pas subi de test de Papanicolaou avant le diagnostic.
  • Il faut absolument déterminer et éliminer les obstacles au dépistage si l'on veut réduire le nombre de cas de cancer du col et les décès qui s'y rattachent.
  • La surveillance des femmes qui passent régulièrement des examens de dépistage et de celles qui ne le font pas a permis de déterminer quels groupes de femmes bénéficieraient le plus de campagnes d'éducation visant à promouvoir le dépistage régulier.
  • L'un des objectifs de toutes les provinces est d'adopter un système normalisé de classification et de rapport des résultats du dépistage du cancer du col.

(Voir : http://www.hc-sc.gc.ca/pphb-dgspsp/publicat/ccsic-dccuac/index-fra.php).

Un diagnostic sur la santé des enfants de l'Ontario

Ce rapport combine des données de recherche et des tendances statistiques pour présenter un aperçu de l'état de santé actuel et futur des enfants, des jeunes et des familles qui vivent en Ontario. Il a été rédigé au moyen d'une approche axée sur la santé de la population - plus précisément, on a évalué les répercussions des grands déterminants de la santé sur l'état de santé des enfants et des familles. Chaque chapitre porte sur un déterminant de la santé et décrit les tendances statistiques et leur impact possible sur la santé et le bien-être des enfants et des familles, ainsi que les répercussions de ces tendances sur les recherches, les programmes et les politiques qui seront élaborées à l'avenir.

Projet d'architecture de bout en bout pour la surveillance de la santé

Initiative de collaboration entre le Centre de coordination de la surveillance de Santé Canada et plusieurs gouvernements provinciaux, le « Projet d'architecture de bout en bout pour la surveillance de la santé » permet de déterminer les genres de données, de fonctions, de méthodes administratives et de réseaux requis pour tirer le meilleur parti possible du processus de surveillance des maladies. Ce projet comporte des recherches sur la situation actuelle des systèmes d'information sur la santé publique et une analyse des renseignements supplémentaires que doivent fournir les médecins et les infirmières en santé publique pour mieux protéger la santé des Canadiens. Il décrit un système d'information optimum destiné à la surveillance de la santé publique, qui comporte des données de surveillance découlant directement de cette information et des technologies de communication que les professionnels de la santé utilisent quotidiennement pour effectuer leur travail. Ce projet détermine également quelles ressources sont requises pour élaborer et utiliser davantage d'outils pratiques, adopter des normes et définitions actuellement élaborées dans le domaine de l'information, et s'assurer que les responsables de la surveillance de la santé au Canada ont accès aux dossiers électroniques de santé des Canadiens (voir : http://www.hc-sc.gc.ca/pphb-dgspsp/csc-ccs/index-fra.php).

Santé des femmes sans-abri

Une récente étude a adopté une approche fondée sur la participation de la collectivité pour connaître les expériences de 126 femmes torontoises qui sont sans-abri ou l'ont déjà été, et pour déterminer l'impact de cette situation sur leur santé affective, mentale, spirituelle et physique. L'étude, intitulée « Common Occurrence: The Impact of Homelessness on Women's Health (juin 2002) », conclut que l'ampleur du problème des femmes sans-abri - et particulièrement la face cachée de ce problème à Toronto - est sous-estimée et mal comprise. Selon une perspective axée sur les déterminants de la santé, cette étude désigne la pauvreté comme l'un des principaux facteurs pouvant engendrer cette situation et présente des recommandations liées à plus de 100 stratégies destinées à régler ce problème. La publication du rapport de cette étude a été parrainée par Sistering: A Women's Place, de concert avec le Centre d'accès aux soins communautaires de Toronto. Le financement a été offert conjointement par le Fonds pour la santé de la population et Situation de la femme Canada, Région de l'Ontario/du Nunavut. Pour obtenir de plus amples renseignements au sujet du rapport, veuillez consulter l'adresse suivante : Ordinary Women in Extraordinary Circumstances. Une vidéo sur les femmes interviewées a été réalisée qui servira d'outil d'éducation et de formation à l'intention des fournisseurs de services et des décideurs.

Rapports de Statistique Canada sur la santé

Statistique Canada a publié un certain nombre de rapports importants sur la santé des Canadiens, entre autres :

  • Enquête nationale sur la santé de la population, aperçu de celle effectuée en 2000 (septembre 2002);
  • Enquête sur la participation et les limitations d'activités (EPLA), rapport de 2001 (décembre 2002);
  • Enquête auprès des peuples autochtones (EPA), rapport de 2001 (mars 2003); et
  • La santé des Autochtones vivant hors réserve. (Ce rapport compare les Autochtones vivant hors réserve au reste de la population canadienne sur le plan de l'état de santé, des comportements adoptés dans ce domaine et de l'utilisation des soins de santé. Il est inclus dans le troisième Rapport sur la santé des Canadiens et des Canadiennes publié en décembre 2002 sous le titre La santé de la population canadienne. Rapport annuel 2002.)

Pour obtenir de plus amples renseignements sur ces rapports et d'autres publications de Statistique Canada, veuillez consulter le site Web du Ministère à l'adresse suivante : Statistique Canada

Information sur les dépenses de santé fournies par l'ICIS

L'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS) vient de publier le Rapport sur les tendances des dépenses nationales de santé (DNS). L'ICIS a pour mandat de fournir en temps opportun des renseignements exacts qui permettent de formuler une politique de santé fiable, de gérer le système de santé canadien de façon efficace et de sensibiliser le public aux facteurs qui nuisent à la santé. Pour obtenir de plus amples renseignements à ce sujet et connaître d'autres publications publiées par cet institut, veuillez vous rendre à l'adresse suivante : L'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS)

Faites une croix sur votre calendrier

Faites une croix sur votre calendrier
Quoi Thème
21st Annual "Protecting Our Children" National American Indian Conference on Child Abuse and Neglect 13 au 16 avril 2003
Portland (Oregon)
http://www.nicwa.org
/services/conferences
/protecting/index.asp
Récupérer nos jeunes autochtones : examen des principaux défis auxquels la jeunesse autochtone est confrontée; mise en valeur des programmes performants qui prouve que la solution passe par la collectivité
Safety in Numbers: Working Together from Research into Practice 28 et 29 avril 2003
Atlanta (Georgia)
http://www.cdc.gov
/ncipc/conference
Pratiques visant à prévenir et à maîtriser les blessures et à réduire les handicaps; les dernières recherches effectuées dans le domaine des blessures; les compétences, les habiletés et l'efficacité dans le domaine des programmes et de la recherche; les partenariats établis en vue de réduire les blessures et les handicaps
Canadian Public Health Association 94th Annual Conference: A View to the Future 10 au 13 mai 2003
Calgary (Alberta)
http://www.cpha.ca/english/
conf/94thAnl/94conf.htm
Les perspectives, les défis et les stratégies modernes; les partenariats en santé publique : les connexions internationales garantes de succès; la technologie : le portail du futur
Child Health 2003 - 3rd World Congress and Exposition

12 au 16 mai 2003
Vancouver (Colombie-Britannique)
http://www.venuewest.com/
childhealth2003/welcome.htm

Examen de questions clés et présentation de mesures préventives et d'approches novatrices visant à réduire les taux de maladie et de décès et à accroître le niveau de bien-être des enfants
E-Health 2003 International Conference: A Catalyst for Change 24 au 27 mai 2003
Toronto (Ontario)
http://www.e-health
conference.com

Les dossiers électroniques de santé, la protection des renseignements sur la santé, les pratiques exemplaires, la télésanté, la sécurité des patients, les dernières tendances

4th Nordic Health Promotion Research Conference 10 au 13 juin 2003
Vasteras (Suède)
http://www.mdh.se
/ivf/nhprc2003/
Le changement de paradigme dans les recherches liées à la promotion de la santé; mise en oeuvre de la pratique fondée sur le changement de philosophie conceptuelle et de méthodologie de recherche
14th International Congress on Women's Health Issues 15 au 18 juin 2003
Victoria (Colombie-Britannique)
http://www.uvcs.uvic.ca
/conf/ICOWHI/
Bâtissons des alliances pour vivre, travailler, effectuer des recherches et pratiquer : la santé des femmes dans le contexte postcolonial
iHEA 2003 4th World Conference 15 au 18 juin 2003
San Francisco (California)
http://www.healtheconomics.org
L'économie mondiale de la santé : le pont entre les recherches et les réformes
Conference on Health and Economic Policy

27 et 28 juin 2003
Munich (Allemagne)
http://www.cesifo.de/

Divers thèmes comme les répercussions des politiques publiques sur la santé; les prévisions en matière d'offre et de demande dans le domaine de la santé; et le vieillissement
The Health Work Force: Managing the Crisis

25 au 27 juin 2003
Calcanissetta (Sicile, Italie)
http://www.ehma.org
/conf2003/index.html

Adapter la santé du travail au système de santé

Références

Références pour l'article « Projet sur les soins primaires à Eskasoni » (page 14)

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